« LA CHUTE » Ce cri qui cherche à faire sombrer un homme

Dans La Chute, récit philosophique paru en 1956, Albert Camus quitte la chaleur de la Méditerranée pour le brouillard des quais du port d’Amsterdam. C’est là que l’unique protagoniste de ce texte s’est réfugié et déplie le fil tragique de sa vie à un interlocuteur invisible du spectateur. Le récit n’est ni gai, ni léger. Cette création du festival d’Avignon Off 2014, qui a évolué au fil des années, reste fidèle à la vision sceptique et lucide sur l’humanité du prix Nobel de littérature.

Jean-Baptiste Clamence a mené une carrière d’avocat à Paris. Un temps révolu pour lui. On comprend peu à peu pourquoi il a quitté les beaux quartiers parisiens et sa vie de bourgeois pour les bars de matelots d’Amsterdam. Une culpabilité le ronge et le hante : un soir sur les quais de la Seine, il est resté ignorant face au cri d’une jeune femme se jetant dans le fleuve. Lui, le pompeux défenseur de la veuve et l’orphelin sous la lumière des tribunaux, se taire comme un rat dans l’obscurité du soir, incapable de lui venir en aide. L’avocat, comme une punition, va glisser du côté du mal, se définissant comme un « juge pénitant », aidant voleurs et criminels. Comme si toute situation finalement était l’égale de l’autre. Albert Camus se sert de ce destin pour dénoncer la noirceur des hommes, lui si avide de justice et de vérité. Le passage du monologue qui détruit les prétendues valeurs de l’amitié questionnera chacun.

Camus_Jean-Phil Raibaud 4
Camus_Jean-Phil Raibaud
Camus_Jean-Phil Raibaud 2

© Jean-Philippe Raibaud

Yvan Morane, qui se met ici en scène, opte pour un plateau dépouillé, meublé d’un seul vieux fauteuil, pivot de la pièce. Seules les lumières et la musique séquencent les étapes de l’histoire, aidant habilement à marquer les changements de lieu et la présence de personnages invisibles. Le comédien et metteur en scène de plus de 90 créations a vu dans ce personnage la volonté de monter « un procès quasi-Kafkaïen et y joue tous les rôles : accusé, avocat de la défense, avocat de l’accusation, procureur … ». Il interprète ce Clamence avec force, clarté et froideur, ne cherchant ni empathie, ni rejet du personnage de la part du spectateur.

 

Informations pratiques

Auteur(s)
Albert Camus
Adaptation pour le théâtre de Catherine Camus et François Chaumette

Mise en scène et lumières
Ivan Morane

Collaboration artistique Bénédicte Nécaille
Son Dominique BATAILLE

Avec
Yvan Morane

Dates
Du 7 mai au 29 juin 2019 mardi au samedi à 21 h – Théâtre Des Mathurins, Paris
Du 21 au 25 août 2019 – Théâtre de la Reine Blanche, Paris

Durée
1h30

Adresse
Théâtre Des Mathurins
36, rue des Mathurins
75008 Paris

Informations complémentaires
www.theatredesmathurins.com