« ORPHÉE ET EURYDICE À BICYCLETTE »  Faut dire qu’ils y mettent du coeur 

Entre deux bicyclettes qui pédalent dans le vide et un cadre qui sert à tout (surtout à en sortir), un couple de trublions égarés nous entraîne dans un monde protéiforme, dérisoire et sublime, au rythme de chansons burlesques et de tirades fantaisistes.

Ils sont Bernard et Jeannine, comédiens en pleine représentation, compagnons de route sur les chemins terreux de la vie, l’enfance en bandoulière pour greffer des ailes aux vélos et prendre leur envol. Ils jouent à se prendre au sérieux, glissant entre deux phrases banales une réplique alambiquée dont on se moque – et sous laquelle pourtant se cache une véritable poésie. Ils sont aussi Orphée et Eurydice, personnages mythologiques surnaturels qu’ils interprètent à leur façon, à leur image, à leur époque… Entre la banalité humaine et la grandeur des mythes, de l’île d’Ouessant aux Champs-Elysées, paradis, enfer, ou plateau de tournage de films pornographiques, leur aventure absurde tisse la trame d’une vie éclatante de joie au milieu d’idéaux qui ne peuvent que tomber. Nous sommes tous un peu Bernard et Jeannine, un peu Orphée et Eurydice…

Dès l’entrée des spectateurs, Marie Réache et Pierre Lericq annoncent la couleur en pulvérisant le quatrième mur, abordant immédiatement un jeu exubérant, volontairement excessif et grotesque, et face auquel on rit… en se demandant un peu dans quoi l’on vient de s’embarquer. Qu’on s’y fasse: on ne le saura jamais vraiment, tant les scènes se succèdent avec une rapidité impressionnante, menées par une énergie explosive au fil d’une écriture fine où jeux de mots et traits d’esprits sont intarissables, et dans laquelle il fait bon s’égarer. On n’a pas le temps de s’ennuyer une seconde, car la pièce a cette caractéristique étrange d’être, semble-t-il, constituée presque exclusivement de ruptures. Les deux comparses glissent aisément d’un rôle à l’autre avec, toujours, une même expressivité ponctuée de chansons aussi entêtantes que drolatiques. Contrairement à ce que pourrait laisser songer le titre, ce n’est pas là une réécriture du mythe d’Orphée et Eurydice, mais plutôt une tentative de se saisir d’un héritage culturel pour s’y confronter, le détourner un peu pour rire, et rire, surtout, des décalages entre ces personnages rêvés et notre condition humaine…

Irrévérencieux, fantaisiste et drôle, cet “Orphée et Eurydice à bicyclette” mérite qu’on aille y faire un tour, par curiosité intellectuelle autant que pour muscler ses zygomatiques. C’est un théâtre de communion, surprenant comme la vie: peu importe où l’on va, autant rire du voyage…

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Informations pratiques

Auteur(s)
Pierre Lericq

Mise en scène
Manon Andersen

Avec
Marie Réache et Pierre Lericq

Dates
Du 13 décembre 2017 au 10 février 2018

Durée
1h25

Adresse
Lucernaire
53 rue Notre-Dame des Champs
75006 Paris

Informations pratiques et dates de tournée
http://www.lucernaire.fr