« Ainsi parlait Zarathoustra », Mise en scène Smael Benabdelouhab au Théâtre de l’Epée de Bois

Le déclin du surhomme de théâtre

Un comédien, Smael Benabdelouhab, interprète le prologue du poème de Nietzsche. Performance hasardeuse que d’adapter Nietzsche au théâtre. Certes, ce texte est un poème, certes sa dimension artistique vaut autant que sa dimension philosophique. Mais alors pourquoi s’encombrer d’une relecture et d’un échange avec le public après la prestation du comédien ? Laisser parler Zarathoustra par la bouche du comédien pour quelques chapitres de plus n’eût-il pas été préférable ?

Que dit Zarathoustra dans ce prologue? Descendu de sa montagne et sorti d’une retraite méditative de dix ans, il entreprend d’éclairer les hommes de sa philosophie : l’homme est un pont entre la bête et le surhomme, Dieu est mort, la responsabilité individuelle commence. La tâche est vaste, car Zarathoustra se rend vite compte que le peuple préfère le bonheur et la sécurité à la liberté. Les croyances sont tenaces et ne tomberont pas de sitôt.

Le jeu du comédien fait tout l’intérêt du spectacle : il est habité, le texte ressort avec force et émotion, Zarathoustra apparaît comme un être venu d’un autre monde, qui s’étonne avec naïveté du comportement des hommes, un peu comme le persan de Montesquieu s’étonne des Occidentaux. Cependant, Zarathoustra aurait gagné à apparaître sous les traits d’un jeune homme plutôt que sous ceux d’un homme mûr. Mais la mise en scène, quasi inexistante, n’apporte rien lorsqu’elle est présente : une musique vient accompagner un texte dont la musicalité propre suffit amplement, l’éclairage surligne les mouvements du texte, et le costume d’un romantique du 19^ème siècle ne fait pas de sens pour un texte intemporel. Seul le passage du masque, où le comédien incarne le dernier homme est pertinent : l’aspect inquiétant du personnage somme toute banal donne au texte une saveur nouvelle.

Ce spectacle aura le mérite d’initier au philosophe allemand ceux qui sont passés à côté de son œuvre essentielle à la compréhension des enjeux sociaux et politiques des 20^ème et 21^ème siècles.

Ainsi parlait Zarathoustra

Durée 1h00, suivi d’une lecture et d’un débat d’1h30

De Friedrich Nietzsche

Mise en scène Smael Benabdelouhab

Avec Smael Benabdelouhab et le conférencier Pierre Heber-Suffrin

Du 21 au 24 avril 2016

Théâtre de l’Epée de Bois

Cartoucherie – Route du Champ de Manœuvre

75012 Paris

www.epeedebois.com