« LE CORPS UTOPIQUE OU IL FAUT TUER LE CHIEN »  Observation à la lucarne d’une hétérotopie salvatrice 

En quelques secondes et jusqu’à la fin du spectacle, Nikolaus nous embarque en zone libre ! Se riant des postures – et impostures – sociétales qui nous encombrent, il revendique l’autodérision et l’humour, la musique, le droit au risque et à l’échec, à la danse et à la fête. Plongée en hétérotopie.

“L’hétérotopie se met à fonctionner à plein lorsque les hommes se trouvent dans une sorte de rupture absolue avec leur temps traditionnel.” *

Entrée du public face à une longue table de conférence. Quelques écriteaux annoncent les intervenants. Seules trois des sept personnes attendues rejoignent la scène : un colonel de gendarmerie, un jeune punk à crête, un professeur émérite. L’organisatrice semble tendue et n’est pas au bout de ses surprises : sous le costume social, le corps est là qui s’agite, tressaute et trépigne d’impatience. Même le cadre, l’écrin de cette rencontre, craque, s’effrite et finit par s’effondrer.

 

« Il y a des hétérotopies qui sont liées […] au temps dans ce qu’il a de plus futile,
de plus passager, de plus précaire, et cela sur le mode de la fête. » *

Le corps utopique ou il faut tuer le chien!
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Le corps utopique ou il faut tuer le chien!

Willkommen ! Avec Le corps utopique, inspiré d’un discours de Michel Foucault, Nikolaus nous offre un observatoire d’hétérotopie, un espace résolument autre, à la temporalité délicieusement chaotique : dans ce huit-clos supposé lieu de parole et d’écoute s’invite une galerie de personnages incapables de s’entendre sur le plan intellectuel, et tellement stéréotypés qu’ils en deviennent surréalistes et grotesques. Loin de toute psychologie de personnages, le spectacle emprunte les outils du dessin animé de cartoon pour tourner en dérision les figures d’autorité, de jeunesse et du savoir. Seul le moment présent compte, avec son lot de pirouettes, de chutes, de cascades burlesques en série, prétextes à vivre des aventures. L’imagination est reine et les scènes visuelles ou contées s’enchaînent, loufoques et absurdes.


Le corps est au centre de ce drôle de cirque musical, comme le lieu absolu, en résistance au chaos du monde et à l’hystérie des hommes. Spontané, immédiat, surprenant, il annihile le costume, la fonction annoncée des personnages et leur vole la vedette. Les acrobates s’envolent par leurs passions virtuoses : jonglerie, mât chinois, clown, piano… fauves et grands singes !
En lieu et place d’une histoire cohérente, de surprises en rebondissements, Nikolaus et ses facétieux acrobates nous chantent un éclatant éloge de la tentative, en corps et en musique.

Le dernier trait des hétérotopies, c’est qu’elles ont, par rapport à l’espace restant, une fonction. Celle-ci se déploie entre deux pôles extrêmes. Ou bien elles ont pour rôle de créer un espace d’illusion qui dénonce comme plus illusoire encore tout l’espace réel, tous les emplacements à l’intérieur desquels la vie humaine est cloisonnée. […] Ou bien, au contraire, créant un autre espace, un autre espace réel, aussi parfait, aussi méticuleux, aussi bien arrangé que le nôtre est désordonné, mal agencé et brouillon.*

* Citations de Michel Foucault, Le Corps Utopique.

 

Informations pratiques

Auteur(s)
Une idée de Nikolaus Holz d’après Michel Foucault

Mise en scène
Christian Lucas

Avec
Mehdi Azema, Pierre Byland, Ode Rosset, Nikolaus

Dates
Du 19 au 29 septembre 2017

Durée
1h30

Adresse
Nouveau Théâtre de Montreuil
Salle Jean-Pierre Vernant,
10 place Jean-Jaurès
93100 Montreuil

http://www.nouveau-theatre-montreuil.com