« La cruche » de Georges Courteline, Mise en scène Henri De Vasselot au Lucernaire

Article de Julien Dumas

L’opéra comique en petit comité

La cruche, c’est Margot, Margot qui est la maîtresse de Lauriane, Lauriane qui voudrait bien être l’amant de Camille, Camille qui aimerait être la maîtresse de Duvernier, Duvernier qui rêve d’être l’amant de Margot. La boucle serait bouclée s’il n’y avait cette histoire de rivalité, car pour ficeler l’affaire de nos 4 compères, Lauriane et Duvernier sont liés d’amitié. C’est à n’y rien comprendre et c’est pourtant bien simple : ce qui tient cette histoire c’est que tous les protagonistes cherchent à fuir ce qu’ils ont et à conquérir ce qu’ils n’auront pas.

© Cédric Barbereau

Si Courteline a écrit cette pièce il y a plus d’un siècle, les mœurs folles qu’il y raconte n’ont quant à elles pas vieilli d’un an. Jouer cette comédie aujourd’hui, c’est l’occasion de se rendre compte que les travers de nos façons contemporaines, ne sont pas si modernes qu’on l’imagine. Finalement les hommes et les femmes ne tireraient-ils pas leurs déboires amoureux de leur nature profonde ? Faut-il que l’on nous retire ce qu’on aime pour vraiment qu’on s’aperçoive qu’on a aimé ? Et la question posée par cette pièce délurée : quand votre ami vous tend sa femme, devez-vous vous en emparer ?

Oui, peut-être, mais à condition d’y mettre les formes ! Quand on adapte une pièce qu’un grand nom a écrite il y a 107 ans, on se demande forcément ce qu’on va ajouter à la recette pour que la saveur soit nouvelle. La troupe de L’envolée lyrique, elle, ne se pose plus la question. Cette compagnie, avec deux prix du public au festival d’Avignon, a parfait sa formule. D’abord, une cuillère d’envolée, le dynamisme de comédiens aussi déjantés que perfectionnistes, qui savent joindre le geste au verbe et le rythme à la mélodie. Ensuite, une louche de lyrisme, chanté à capella, maîtrisé comme à l’opéra, saupoudré sur le texte original pour enchanter l’assistance et bercer l’oreille.

© Cédric Barbereau

Tordu de rire devant les acrobaties faciales et les éclats d’acteurs hauts en couleur, on pourrait presque oublier le travail considérable de mise en scène et d’interprétation magistrale. Ce que l’on n’oublie pas, quoi qu’il en soit, c’est un soin du décor aussi simple que beau, peint comme un fond de maison de poupée, et emballé dans des costumes sortis d’une boîte à musique. Du Courteline on en avait déjà vu, on en avait déjà ri, mais on n’en avait jamais vécu de si bien incarné, de si classiquement moderne et de si profondément gai. Alors faites donc comme tel, sans trop vous questionner, courez voir ces quatre comédiens rire, aimer et chanter.

 

 

 

 

La cruche

De Georges Courteline

Mise en scène et scénographie Henri De Vasselot

Assistanat à la mise en scène Pauline Paolini

Interprété par Antonine Bacquet, Agathe Trebucq, Florence Alayrac, Maria Mirante, Martin Jeudy, Marc Valéro, Alexander Swan, Marc Sollogoub, Henri De Vasselot

Lumières Thomas Jacquemart

Costumes Florence Alayrac

 

Du 14 décembre 2016 au 22 janvier 2017

Du mardi au samedi à 19h – Dimanche à 15h

(relâches les 25 décembre et 1er janvier)

 

Théâtre Lucernaire

53, rue Notre-Dame-des-Champs

75006 Paris

www.lucernaire.fr