« FESTIVAL DE CAVES 2018 – WEEK-END D’OUVERTURE À BESANÇON » Moments suspendus : de la légèreté de l’être aux fondements de la société

En ce début du mois de mai, s’ouvre à Besançon la 13ème édition du Festival de Caves. Le long du Doubs, les belles pierres des édifices dorées par le soleil et les réverbérations offrent des tableaux pittoresques. Cette ville agréable chargée d’histoire recèle bien des trésors. Au détour de ruelles, de jardins ombragés ou de cours intérieures aux escaliers bisontins typiques, les spectateurs ressentent une certaine excitation en pénétrant dans ces lieux souterrains, antres de la création théâtrale tenus secrets jusqu’au dernier moment. Initiée en 2005 par Guillaume Dujardin avec la Compagnie Mala Noche, l’aventure des « caves » se poursuit du 2 mai au 30 juin 2018 avec 24 spectacles dans 100 villes et villages, 10 régions en France et en Suisse. Le directeur artistique propose un cadre fort (troupe, cave,…) et l’occasion de rencontres où cette année encore, une soixantaine de comédiens et metteurs en scène jeunes ou expérimentés oeuvrent en toute liberté !

Du choix du texte à la dramaturgie ou à la forme, les artistes ont conçu ou adapté de nouvelles pièces pour le festival à partir de leurs univers et leurs inspirations. La programmation s’étoffe en 2018 avec les créations partenaires du Collectif Mixeratum Ergo Sum de Bordeaux et les travaux réalisés par les étudiants de l’Université de Franche-Comté et du Conservatoire régional, accompagnés par des metteurs en scène du festival. Autant de décors, de thématiques et de propositions originales, drôles et variées à découvrir durant deux mois. Le temps d’un week-end, l’équipe du Festival donne un aperçu de la saison en textes, en musiques, en images et programme cinq premières pour une immersion dans l’intimité de la cave, lieu de tous les possibles. Des expériences uniques et des voyages inattendus où le jeu des comédiens s’apprécie de près, car dans ces espaces exiguës le nombre de spectateurs est limité à dix-neuf par représentation.

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© Patrice Forsans

Dans l’obscurité, une voix s’élève sous un amas de plastiques noirs. Loin de l’agitation, avec torpeur un cafard sort de sa tanière, intrigué par sa faculté de penser. Est-il un homme à l’apparence animale ou bien l’inverse ? Anaïs Marty joue cette créature hybride qui tente de s’extirper de sa condition par des rêveries musicales et colorées. « Comme je suis terrain vague», pièce écrite et mise en scène par Simon Vincent rappelle « la Métamorphose » de Franz Kafka. C’est un hommage aux artistes en proie aux doutes, aux questionnements dans une société stigmatisante, à ceux capables à partir de rien, d’expérimenter, de concevoir et de se renouveler parfois de manière fulgurante. À l’abri dans le cocon obscur, l’esprit vagabonde, la faim tenaille et la musique se compose avec fantaisie. Les masques tombent et l’on perçoit la fragilité, l’animalité et les élans de l’être. La comédienne investit bien son espace, opère des transformations sous la matière noire éclatante. Le « noir » inspira les peintres : Pierre Soulages en fit jaillir la lumière à travers son œuvre, Odilon Redon et Gustave Doré des univers peuplés de créatures fantastiques. De bête pensante à bête de scène, cette exploration étonnante puise ses ressorts dans les actions, l’humour et l’imaginaire avec légèreté.

 

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Non loin des Bains-Douches de la Madeleine datant du 18ème, nous retrouvons Maximilien Robespierre en plein bain de pied. « La méduse démocratique » invite à la cave cette figure controversée de la Révolution française, fervent défenseur de la liberté et des droits sociaux qui incarne pourtant la période de la Terreur en 1793, une dictature politique où un tribunal révolutionnaire mena les adversaires de la République à l’échafaud ! Ce véritable bain de sang prit fin un an plus tard lors de la chute de Robespierre et de ses partisans. Guillotiné comme la Méduse par Persée, l’homme répond aux accusations du passé, aux questions en voix off de l’historienne Sophie Wahnich et tente de redorer son image. L’orateur déploie ses tentacules républicains devant l’assemblée de spectateurs assis autour de la table. Il rappelle les fondements de la démocratie et alerte sur sa possible extinction dans la société actuelle où le citoyen a selon lui un rôle à jouer pour préserver sa liberté. Le comédien Damien Houssier porte admirablement les textes de Robespierre et de Saint Just. La mise en scène d’Anne Monfort mêle judicieusement Histoire et actualités, documentaire et fiction. Damien Houssier offre une interprétation magistrale et nous emporte dans un voyage suspendu dans le temps. À ne pas manquer durant ce festival ! Retrouvez ce comédien remarquable dans la création « Programme Arkadia » en compagnie de Marie Champain.

 

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Ambiance tamisée d’un bar, le chanteur Charly Marty nous emporte dans une aventure musicale tout en séduction. L’homme reprend de célèbres tubes en déroulant le fil de sa vie avec pour commencer « Je te promets », un bel hommage à Johnny Hallyday. « Les garçons ne pleurent pas !» est une entrevue intimiste où le comédien se livre au fil des chansons, avec une certaine fragilité et de la retenue. L’interprétation du musicien chanteur Charly Marty est parfaitement maîtrisée. Sensuel, viril et provocateur, l’homme hétérosexuel semble perdre progressivement ses repères, ses certitudes tombent une à une dans une société qui évolue souvent plus vite que lui. Sur une idée et mise en scène de Thibault Rossigneux, cette pièce écrite par Julie Ménard questionne l’image de l’homme aujourd’hui en mettant à mal les idées préconçues.

 

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«Deux mots » : la jeune femme vide son sac au sens propre comme au figuré. Énumérations surprenantes, jeux de mots, fantaisies et burlesque, le texte de Philippe Dorin laisse entrevoir derrière la banalité et la rugosité du quotidien, la solitude d’une femme et le destin tragique et singulier qu’elle essaie d’affronter. Anne-Laure Sanchez mène ce monologue avec une simplicité déconcertante. Lumineuse, à fleur de peau, drôle et révoltée, elle se confie au public, explique, commente mais on sent bien que la situation peut basculer à tout moment dans cette mise en scène de Monique Hervouet (Cie Banquet d’Avril). Sur le plateau vide, cette humanité modeste, vibrante et poétique nous éclate en pleine figure. Une belle proposition à savourer ! À Besançon, Paris, Nantes, Bordeaux, Strasbourg,… le Festival de Caves programme 200 dates en France et en Suisse. Tentez l’expérience jusqu’au 30 juin 2018.

 

Informations pratiques
FESTIVAL DE CAVES 2018 – WEEK-END D’OUVERTURE À BESANÇON

COMME JE SUIS TERRAIN VAGUE
Écrit et mis en scène par Simon Vincent
Avec Anaïs Marty
Costumes Louise Yribarren

LA MÉDUSE DÉMOCRATIQUE
D’après Robespierre, Saint Just et Sophie Wahnich
Mise en scène d’Anne Monfort
Avec Damien Houssier
Lumières Hugo Dragone
Costumes Louise Yribarren

LES GARÇONS NE PLEURENT PAS !
De Julie Ménard
Sur une idée et mise en scène de Thibault Rossigneux
Interprétation et composition musicale de Charly Marty

DEUX MOTS
De Philippe Dorin
Mise en scène de Monique Hervouet
Avec Anne-Laure Sanchez

Photographies Patrice Forsans

 

Dates
Du 2 mai au 30 juin 2018
24 spectacles dans 100 villes et villages,
200 dates dans 10 régions en France et en Suisse

 

Adresse
FESTIVAL DE CAVES 2018
Théâtre souterrain en France
8/10 Avenue de Chardonnet
25000 Besançon

 


Informations complémentaires
http://www.festivaldecaves.fr/