« Cross, chant des collèges », de Julie Rossello-Rochet, aux Editions Théâtrales.

Un article de Pierre-Alexandre Culo.

 

 

Blake Midias, collégienne de 12 ans, est victime d’un cyber-harcèlement cruel au sein de son collège de Saint-Priest. Faits virulents de société, dévoilés par les mots justes et détachés de Julie  Rossello-Rochet. L’auteure nous immisce dans les couloirs de cette prise au piège où les réseaux sociaux perturbent les limites de la liberté d’expression. Entre les fantasmes de ses émois nocturnes et la dure réalité des violences adolescentes, Blake Midias révèle par son parcours les difficultés de se construire dans le regard des autres. Une pièce vive et pleine d’émotion.

« Elle transpire, elle transpire comme jamais comme si son énergie se trans- formait en eau. Elle sent les regards qui se posent dans le vestiaire, une tension électrique dans son dos, elle se dit : se dépêcher pas trop traîner ici c’est ce qu’il y a de mieux à faire, elle se changera ce soir chez elle, alors elle enfile son sweat et elle sort – TROP CRADE ! T’AS VU, ELLE CHANGE MEME PAS DE TEE-SHIRT ! »

La semaine se déroule devant nos yeux. De cours en cours, les engrenages du cyber-harcèlement  s’activent et s’accélèrent. Une seule consigne à tenter de respecter, tenir la tête haute pour ne pas tomber. Blake a l’âge – enfin se dit-elle- pour s’inscrire sur Facebook.

Des insultes en pleine lumière sur son mur, « Dégage, t’as rien à faire là, de toute façon je t’aime pas. », et s’ensuivent la publication de photos dérobées aux vestiaires, harcèlement téléphonique et tous les coups que les fureurs adolescentes peuvent commettre.

Accueillie dans les classes de sixième et troisième du collège Colette de Saint-Priest, Julie Rossello-Rochet peint avec justesse le décor collégien, l’angoisse des couloirs, les joutes et jugements de regard au sein de la cour. Entre la scène scolaire et numérique, elle en ressort un chant particulièrement juste qui s’adresse à la fois aux adolescent-es et adultes. Sa poésie douce et haletante se libère de la tragédie et du sensationnel pour révéler un récit cathartique subtile où le rêve de soi côtoie la violence des autres.

« Elle est là, ni moche, ni belle, avec les yeux et le sourire immenses lorsqu’elle dit au revoir bonne journée!, qu’elle enfile son manteau qu’elle saisit sa sacoche qu’elle ouvre la porte et que le froid la saisit.

Elle part, elle avance, elle déplie ses jambes fines, elle s’y prend d’un long pas, d’un pas fébrile mais rapide, Blake s’enfonce dans le jour, elle fend l’air, les épaules un peu basses mais fière ce matin, elle marche rue de la Gare. »


Cross, chant des collèges

De Julie Rossello-Trichet

Editions Théâtrales

10 euros

http://www.editionstheatrales.fr/livres/cross-chant-des-colleges-1348.html