« Réparer les vivants » adaptation théâtrale du roman de Maylis de Kerangal Réparer les vivants et mise en scène par Sylvain Maurice au théâtre Paris-Villette

Article de Vincent Lenoir

A cœur ouvert

« Réparer les vivants » est le roman d’une transplantation cardiaque. Best-seller publié à plus de 150 000 exemplaires depuis sa sortie en 2014, Maylis de Kerangal a reçu pas moins d’une dizaine de prix littéraires et continue toujours d’inspirer les metteurs en scène. Après la performance d’Emmanuel Noblet au Festival Off d’Avignon, Sylvain Maurice nous propose une nouvelle adaptation. Dans une mise en scène ingénieuse et soigneusement épurée, il fait porter à la scène ce récit bouleversant où les voix des personnages sonnent dans l’urgence de la situation.

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© E. Carecchio

Les thèmes sont lourds et bouleversants d’universalisme : la vie, la mort, le deuil, la renaissance. La mort, celle de Simon Limbres, un jeune garçon âgé de 19 ans, qui à la suite d’un violent accident de voiture, se fracasse le crâne. À son arrivée à l’hôpital, il est déclaré en « mort cérébrale ». Le choc de ses parents est immense. Alors qu’ils n’ont à peine le temps de conscientiser le départ de leur fils, ils sont confrontés à la question du don de ses organes pour une greffe, celle d’une femme, Claire. Claire, 50 ans vit à Paris avec un cœur abîmé et s’attache furieusement à la vie dans l’espoir d’un donneur compatible. Le compte à rebours est lancé, il ne reste que quatre heures avant la transplantation cardiaque. Les chirurgiens se lancent alors dans une véritable course médicale contre-la-montre pour transplanter le cœur de Simon dans celui de Claire. Une course qui unit les âges, la mort et la vie et donne au récit une intensité hors norme.

Seul en scène, Vincent Dissez habite le texte dans une splendeur et une vérité à couper le souffle. C’est avec une présence remarquable qu’il traverse les personnages les uns après les autres, passant de la mère de Simon, à l’infirmière puis encore au chirurgien ou à l’anesthésiste. Son phrasé est limpide, sa langue implacable et sa diction haletante. Les dialogues s’entremêlent à la narration et aux paroles rapportées dans cette course vibrante pour la vie, où chaque seconde compte.

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© E. Carecchio

Rien n’est statique, rien n’est figé, tout n’est que mouvement ; et le décor imaginé par Eric Soyer et Sylvain Maurice participe au succès de cette mise en scène. Vincent Dissez, en jean et baskets, évolue dans un décor imprévu composé d’un tapis roulant sur lequel celui-ci se livre à une véritable performance sportive et d’un portique animé nous rappelant les battements du cœur de Simon. Joachim Latarjet, le musicien, perché sur le portique encadrant le tapis roulant, seconde le comédien. Les sonorités musicales (chant, jazz, pop,…) à la délicate, libre et énergique épousent à merveille le texte du comédien. La lumière blanche du plateau reste sobre, élégante et juste. Au rythme de la mise en scène, les pages du roman semblent se tourner.

Entremêlant tragédie intime et familiale, questions médicales et éthiques, l’œuvre est forte et marquante. Une vraie remise en question du don d’organe, au-delà des clichés. Époustouflant.

 

 

Réparer les vivants

D’après le roman de Maylis de Kerangal @édition Gallimard publié par Verticales
Version scénique et mise en scène Sylvain Maurice
Assistant à la mise en scène Nicolas Laurent
Scénographie Eric Soyer
Lumière Eric Soyer en collaboration avec Gwendal Malard
Création et composition musicale Joachim Latarjet
Costumes Marie la Rocca
Régie générale Rémi Rose

Avec Vincent Dissez, Joachim Latarjet

 

Du 8 Avril au 17 Avril 2016

 

Au théâtre Paris -Villette

211 avenue Jean Jaurès

75019 PARIS

http://www.theatre-paris-villette.fr/spectacle/reparer-les-vivants-2016-04-08/