« 4:48 PSYCHOSE » de Sarah Kane, L’intensité du désespoir

Sarah Kane est une sorte de météore. Elle a traversé le firmament théâtral brièvement mais avec une intensité rarement atteinte. Toute personne qui s’intéressait un peu au théâtre dans les années 1990/2000 a entendu parler de ses pièces intenses, tragiques et sans concession et, en France, a pu entendre les adaptations radiophoniques réalisées sur France Culture.

Jeune fille puis jeune femme totalement désespérée, Sarah Kane tente de mettre en mots et en scène le monde tel qu’elle le perçoit : cruel, agressif, dévastateur, sans pitié. Souffrant très certainement de graves troubles psychologiques, mal reçue dans l’univers qui aurait peut-être pu la sauver, elle a mis fin à ses jours pour échapper à ses souffrances, laissant une œuvre limitée à cinq pièces : Anéantis, L’amour de Phèdre, Purifiés, Manque, 4 :48 Psychose : et un film : Skin.

Les Éditions de l’Arche proposent ici 4 :48 Psychose et Skin traduits par Vanasay Khamphommala. Une très belle édition sur fond noir, noir comme était l’humeur de Sarah Kane. Dans 4 :48 Psychose, il s’agit de suivre la dernière nuit de celle qui a décidé de « partir » à 4h48, en ayant scrupuleusement noté ses actes et ses pensées, ainsi que ses sentiments.
-Qu’est-ce que vous apportez à vos amis ?
-Qu’est-ce que vous apportez ?

Le silence vient seul en réponse : une nuit, tout m’a été révélé. Comment pourrais-je encore parler ? tragique solitude de la personne psychotique. Mais aussi extraordinaire force de celle qui sait qu’elle ne s’en sortira pas et qui consacre ses dernières forces à cette description désespérée. Ses précédentes pièces, elle les a montées elle-même et si certains ont été sensibles (Bond et Pinter) à ce « théâtre coup de poing », elle a surtout connu les attaques et les quolibets. Cette pièce-ci, la plus noire, ne sera montée que le 23 juin 2000 par James Macdonald au Royal Court Théâtre de Londres. C’était un an et demi après le suicide de Sarah. La lecture de ce texte ne laisse pas indemne.

Le scénario de son seul film Skin, n’est pas plus joyeux : il montre comment un petit groupe de racistes s’en prend à un couple mixte qui sort de l’église, le jour de son mariage ; mais aussi comment une jeune noire, réussit à retourner la situation en faisant subir les pires sévices à l’un d’eux. Aucune tendresse, pas même un peu d’aménité. Sarah Kane vivait le monde comme une catastrophe, un abîme de cruauté et de haine.

Informations pratiques

Auteur(s)
Sarah Kane

Prix
14 euros

L’Arche Éditeur
www.arche-editeur.com