Blanc de blanc de Shu Okuno, Compagnie Ôbungessha © Tomokane-Ayaka
Au sol, un paysage inattendu composé de quelques sphères blanches éparses de différentes dimensions dont se saisit un personnage lunaire vêtu d’un pantalon taille haute blanc à bretelles et d’un bonnet court, interprété par l’artiste japonais Shu Okuno. Avec des mouvements aériens, le peintre-mime redessine l’espace et entraîne le public dans un voyage imaginaire tout en douceur. Sans un mot et accompagné par des mélodies au piano, il présente six saynètes dont il écrit pour chacune le titre à la craie sur le fond noir : L’heure bleue, Ambiance dimanche (en 2020), Blague cosmique, Le Tailleur, Installation du décor de Blanc de blanc et pour finir Autoportrait. Ces instantanés de vie poétiques et tendres en partie autobiographique sont propices à la rêverie et montrent le talent de Shu Okuno à travers un corps dansant épousant à merveille la musique de Jordane Tumarinson avec une simplicité déconcertante. Le mime rend hommage aux maîtres Marcel Marceau et Étienne Decroux dont il a reçu les enseignements offrant une grammaire du corps riche et précise. Cet être sensible se nourrit de son environnement réel ou fictif et de ses émotions, il entre parfois en interaction avec le public qui reste captif à cette narration gestuelle et dansée.
L’heure bleue nimbe la scène d’une couleur bleutée, celle du crépuscule où l’artiste est arrivé à Paris fatigué, il marche et soudain happé par un espace étrange, l’homme est entraîné par sa valise dans un étonnant ballet qui libère son corps. Un tableau épuré à la belle esthétique. Dans Ambiance dimanche (en 2020), le personnage est enfermé dans son quotidien et se prend à rêver d’espaces, de gens et des bruits de la ville. Cette pièce créée pendant le confinement parle de notre condition, des inquiétudes face à l’avenir et comment le corps s’en libère par le biais de l’imaginaire.
Le Tailleur nous fait pénétrer au coeur d’un atelier où le personnage découpe, coud, s’exécute à la machine avec des gestes minutieux. Cela fait penser instantanément au travail d’Étienne Decroux qui a célébré les métiers à travers ses œuvres tels Le menuisier, La semeuse ou L’usine montrant toute la puissance du mime corporel dramatique.
Cela monte crescendo pour arriver à l’essence de Blanc de blanc et à l’Installation du décor qui nous fait survoler la ville lumière et des paysages bucoliques, un moment d’émotions avec de belles envolées lyriques. La magie opère et petits et grands sont conquis par ce spectacle unique et la prestation brillante et généreuse de Shu Okuno. Bravo à toute l’équipe artistique et technique qui a contribué à la beauté et au charme de ce solo : chorégraphie, scénographie, musique, costumes et lumières s’associent remarquablement bien.
Durant cette 58ème édition du Festival OFF Avignon, le Théâtre Transversal fait la part belle à l’art du mime et du geste puisqu’un deuxième spectacle Public : Mode d’emploi ? Ou l’art d’être spectateur de Yves Marc y est présenté (Cf. Critique Théâtreactu Public : Mode d’emploi ? Ou l’art d’être spectateur).
Blanc de blanc de Shu Okuno, Compagnie Ôbungessha © Tomokane-Ayaka
Informations pratiques
BLANC DE BLANC – Compagnie Ôbungessha – Création 2023
Festival OFF d’Avignon du 29 juin au 21 juillet 2024
Mise en scène, chorégraphie
Shu Okuno
Interprétation
Shu Okuno
Musique Jordane Tumarinson
Scénographie Nanako Ishizuka (Dominique Perrault Architecture)
Lumière Marika Nakasa (Kukan-Kikaku)
Costumes Michiko Kono
Durée
1h
Dates
Du 29 juin au 21 juillet 2024 à 10h45 au Théâtre Transversal, Avignon
Adresse
Théâtre Transversal
10, rue d’Amphoux
84000 Avignon
Informations complémentaires
Théâtre Transversal
theatretransversal.com
Festival OFF d’Avignon
www.avignonleoff.com
Compagnie Ôbungessha
www.obungessha.com