Ouvrant le Festival « Outre-Mer Veille » au Tarmac, Le But De Roberto Carlos nous transporte, à l’instar de la tragédie Lampedusa de Lina Prosa, dans l’univers occulté d’espoir et d’abattements de la migration humaine à notre époque.
Une odyssée moderne prend place sur scène, mais presque plus sensiblement dans nos oreilles que devant nos yeux. Empli d’honnêteté, de franchise et surtout de réalité, le texte de Michel Simonot nous transporte dans les impressions et perceptions du voyageur, et de ses différentes rencontres. Une voix nous fait vivre le camion dans le désert, la traversée en mer, et autres moments de cette épopée. L’histoire du voyage n’est pas racontée, elle est évoquée ; le spectateur est comme placé à l’intérieur de l’esprit du personnage cherchant ses mots, ses souvenirs, et reçoit en même temps que lui les pensées qui le traverse, comme les ressentis de ses rencontres, les buts qu’il marque dans son imaginaire, ou les peurs qui le paralysent.
C’est l’histoire d’un but, marqué ou à atteindre. Si Roberto Carlos a pu le marquer, pourquoi pas moi ? La traversée du terrain est juste plus longue. On saute de joie lors d’un but pour relâcher la tension accumulée pendant la course. C’est donc lors de la course que le jeu est essentiel. Ici c’est la course que l’on vit. Du puissant espoir, l’ouverture, jusqu’à la désillusion, en passant par le retour, la seconde tentative, la perte d’un équipier. Dans cette course, les tacles, pressing, passes et gestes techniques sont des interrogatoires, des fuites, des escalades de barbelés ou des rackets, et les défenseurs adverses sont des hommes armés, des passeurs, un contrôle à la frontière.
© Blind – Tropiques Atrium – Denis Dalleux
Cette unique voix emporte dans l’univers de ce voyage perdu d’avance. Le soutien musical apporté par une flûte peul, deux ngonis et du chant ancre encore davantage dans cette ambiance à la fois douloureuse et enthousiaste. En outre, la sobriété de la mise en scène fait qu’elle n’apporte pas beaucoup au texte, dont la puissance évocatrice frappe juste et de façon assez immédiate. On se retrouve presque plus transporté en fermant les yeux. La chorégraphie suivie par le comédien isolé au centre du plateau ne transmet qu’assez peu de l’état émotionnel du personnage ou de la situation dans laquelle il se trouve ou se projette. Finalement, même si l’image rendue au plateau conserve une certaine qualité esthétique, elle bride probablement le comédien dans la transmission d’images et d’émotions qu’il amorce ici. Un peu frustrant. Cela créé une distance avec la situation et le personnage, alors qu’on voudrait le vivre avec lui. Impressionnante vibration sonore.
Informations pratiques
Auteur(s)
Michel Simonot
Mise en scène
Hassani Kassi Kouyaté
Avec
Ruddy Sylaire, Tom Diakité (Ngoni, chant), Simon Winsé (Ngoni, flûte peul)
Dates
Du 17 au 20 mai 2017
Durée
1h10
Adresse
Le Tarmac, la Scène Internationale Francophone
159, avenue Gambetta
75020 Paris