« DOSSIER K. » Culpabilité imaginaire et poésie béton

Descente aux enfers. Quand on n’est pas coupable, pourquoi se fait-on arrêter ? On n’arrête pas les gens comme ça, pour rien. On ne s’embête pas avec toute cette procédure sans s’assurer que la personne est coupable. On ne l’envoie pas au tribunal pour la blague. Non ?
Cette intrigue (résumé à la va-vite), c’est bien entendu celle du Procès, de Franz Kafka. Œuvre majeure de la littérature mondiale, elle raconte le calvaire de Joseph K. , employé de banque, accusé d’un crime dont il ne connaît aucun détail ; il tentera néanmoins, sans succès, de se défendre, et finira exécuté dans une carrière.

Et c’est ce livre (plus quelques autres textes de Kafka) qui compose la base de la pièce « Dossier K. ». Deux murs gris, arrondis, auxquels sont accrochés des téléphones. Un mur droit, en fond. Bruits de tuyauteries, ambiance inquiétante, lumières tamisées. On plante le décor, au faux air de Brazil (Terry Gilliam et son univers, kafkaïen, évidemment).

Mais rien de fondamentalement inquiétant ici. D’abord parce que Monsieur K. ne croit pas une seconde qu’il sera véritablement condamné. C’est une méprise, ça ne tient pas debout, et ces policiers ressemblaient plus à des voyous qu’autre chose. Une parole quotidienne banalisant l’évènement, un babil un peu étrange, décalé, auquel on s’attache assez vite.

© Florent Jacob

 

Plutôt qu’une adaptation fidèle du roman, Pierre-Yves Chapalain tient plutôt à faire surgir des instants, des situations, des personnages, « ce qui resterait à l’esprit de Pierre-Yves quand il en aurait oublié tout le reste ».

Ce qui peut parfois perturber, puisque le spectacle demande de l’attention. Sans connaître au moins un minimum la trame du Procès, on risque de ne pas se laisser emporter si facilement. Ce serait dommage, au vu de la qualité de la scénographie, renforçant le côté labyrinthique de cet imbroglio judiciaire, et le jeu de lumière ultra-délicat qui accompagne Monsieur K. et ceux qui gravitent autour de lui.

Une belle fulgurance, qu’on appréciera d’autant plus si l’on est déjà touché par le matériau original. Ceux-là seront comblés. Les autres pourront tout de même découvrir un excellent comédien, servi par un arsenal de bonnes idées.

Informations pratiques

Texte
Pierre-Yves Chapalain

Mise en scène
Pierre-Yves Chapalain, Géraldine Foucault, Laurent Gutmann

Avec
Pierre-Yves Chapalain, Daniel Dubois

Création sonore
Géraldine Foucault

Dates
Du 2 janvier au 2 février 2019

 

Durée
1h15

 

Adresse
Théâtre l’échangeur Bagnolet
59, Avenue du Général de Gaulle 93170 Bagnolet

 

Informations complémentaires
http://www.lechangeur.org//