GÊNES 2001 de Fausto Paravidino aux éditions L’Arche Éditeur. Traduit par Philippe Di Meo et Caroline Michel.
En 2001, avait lieu la réunion du G8, rituelle rencontre des nations les plus riches, au cours de laquelle nulle décision n’est prise, mais où les dirigeants, portés par le grand capital, se mettent d’accord pour surtout préserver les intérêts de ce dernier. Proposé par la France de Giscard en 1975, il regroupe aujourd’hui : la France, les États-Unis, la Russie, l’Allemagne, le Japon, l’Italie, le Canada. Depuis les années 80, les altermondialistes organisent des « contre-sommets » afin d’attirer l’attention sur la pauvreté dans le monde. Assez bon-enfant au début, le mouvement a pris de l’ampleur au fil des ans. Conséquence, le mouvement a été infiltré par les policiers et sont apparus les « black-blocks » casseurs bien pratiques pour justifier les interventions musclées de la police.
En 2001, donc, le G8 est convoqué à Gênes. Dès avant, on apprend que la mobilisation policière sera exceptionnellement importante. Berlusconi n’a pas l’intention de laisser les altermondialistes s’exprimer. Il se considère comme le champion des affaires et traite son pays comme une entreprise. Mais les militants sont à la fois naïfs et déterminés. Ils se rendent à Gênes en grand nombre pour faire entendre la voix des sans-voix.
Chaos gigantesque pendant trois jours. Attaque délibérée et coordonnée des forces de l’ordre, arrestations, 600 blessés, 1 mort.
Voilà l’objet du texte de Fausto Paravidino, jeune auteur et activiste italien, né en 1976 à Gênes, justement. Son texte est une œuvre chorale, sans rôles identifiés, mais extrêmement bien informé. Les témoins racontent leur effarement, les acteurs policiers évoquent crûment leur détermination à éliminer la « vermine » communiste (!) les manifestants revivent douloureusement et avec colère, les nasses organisées dans lesquelles, piégés, ils ont été roués de coups, eux qui n’avaient que leurs mains nues… seuls les insaisissables black-blocks n’ont jamais parlé, mais on les a vus agir sous les yeux de la police sans que celle-ci intervienne… « C’est comme ça qu’on apprend à la fermer… ».
L’école Armando Diaz a généreusement été prêtée aux associations protestataires ; la prendre d’assaut n’a pas été difficile. La police prétend y avoir trouvé 5 bâtons, 2 masses de chantier, 1 pioche, 7 tubes d’aluminium, 1 pelle, 2 marteaux. Matériel trouvé sans doute sur le chantier voisin. Deux heures de hurlements ininterrompus, trente brancards : têtes cassées, côtes brisées, rates perforées, dents perdues… pas encore d’yeux crevés. Les flashballs n’existent pas encore. Il y a du sang partout : des flaques sur le sol, des traînées sur les murs, les radiateurs. Des dents parsèment le sol…
Aucune condamnation n’a été prononcée à l’encontre des forces de « l’ordre ».
Dénoncé sur la terre entière (souvent hypocritement) l’événement a fait date et il a comme ouvert les vannes pour cette guerre aux pauvres décomplexée qui a, depuis, ponctué les actions de la société civile. C’est ce que l’auteur met en évidence dans le second texte : Gênes 2021, où il passe au crible le système idéologique de l’économie ultra-libérale. Nous avons tous assisté aux exactions policières pendant la crise des gilets jaunes et le rituel se reproduit chaque occasion.
Informations pratiques
Auteur(s)
Fausto Paravidino
Prix
14 euros
L’Arche Éditeur
www.arche-editeur.com