La Gaîté Lyrique organise, avec la biennale internationale des arts numériques Nemo, le festival Sors de ce corps ! qui se tient du 2 au 11 février. L’événement rassemble des formes très diverses et innovantes pour explorer les rencontres possibles entre la scène et les nouveaux outils technologiques. Un bon nombre d’expériences de spectateur et spectatrice qui ont pour ligne commune la mise en question du corps (absent, dématérialisé ou augmenté) par la technologie.
Dans le cadre de ce festival passionnant, Thibault Croisy invite les spectateur à venir faire l’expérience d’une sexualité polluée de stéréotypes : le sadomasochisme. A la suite d’une interview étendue sur plusieurs mois avec le même homme, Thibault Croisy promet une création visuelle et sonore, sans acteur ou actrice, pour faire l’expérience de cette sexualité entre plaisir et douleur. Un programme excitant qui ne tient en rien ses promesses. Ne reste qu’une création fainéante, racoleuse, polluée par l’égo surdéveloppé de l’artiste.
Placé.es dans un dispositif impressionnant et prometteur, les spectateurs et spectatrices s’installent dans un espace où le sol est entièrement couvert de matelas en mousse. Tous et toutes s’allongent les un.es près des autres. Au-dessus de leurs têtes, un long tissu les surplombe. Le cadre promet une expérience saisissante.
Témoignage d’un homme qui n’avait pas envie d’en castrer un autre se révèle être un documentaire sans l’image, un simple montage de ces trois journées interviews mises bout à bout pendant deux heures trente. On ne peut nier que l’absence d’image stimule un imaginaire personnel qui vient se déposer sur les paroles de l’homme. Mais est-ce suffisant ? Est-ce une véritable création ou l’accaparation d’un témoignage passionnant pour faire œuvre en son nom ? Où est l’appropriation de l’artiste dans cette matière ? Nulle part.
Thibault Croisy annonce une pièce sonore mais où se trouve la création sonore ? Il ne faut pas confondre le travail du son et de la parole. Thibault Croisy annonce une pièce visuelle mais le travail simpliste de quelques projecteurs sur un drap suspendu permettent-ils une véritable expérience sensorielle ? Non ! Le témoignage révèle pourtant un homme passionné par sa sexualité, avec une réflexion pointue et passionnante sur l’essence de cette pratique. Il est plaisant de s’accrocher à ses paroles si l’ensemble n’était pas perturbé par l’omniprésence de Thibault Croisy et ses questions à la recherche de sensationnel, de scabreux, frôlant parfois la bêtise. Comment peut-on sérieusement demander si l’on a des rapports sexuels avec des mineurs, en prétextant que l’on ne savait pas qu’ils étaient légalement interdits entre un majeur et un mineur ?
Dans une dernière partie, Thibault Croisy va faire l’expérience de la position de soumission avec l’Homme et enregistrer la séquence. Une idée forte si elle n’était pas tâchée par les élucubrations de l’artiste qui, sous prétexte de son angoisse, se complait dans une logorrhée désaxée du sujet. Un moment « drama-queen » parfaitement superficiel, mettant davantage en scène sa propre personne que le sujet de son spectacle.
Thibault Croisy peut affirmer fièrement que « à partir du moment où on décide que ça fait spectacle, ça fait spectacle » mais se reposer sur un témoignage attrayant en se permettant de de rien construire autour, non, ne fait pas spectacle.
Informations pratiques
Conception
Thibault Croisy
Dates
Le 5 et 6 février 2018
Durée
2h30
Adresse
La Gaîté Lyrique
3 bis rue Papin
75003 Paris
Informations et dates de tournée
https://gaite-lyrique.net