[Avignon IN] "LE JARDIN DES DÉLICES" Philippe Quesne et le Vivarium Studio ré-enchantent la Carrière de Boulbon avec une fantaisie inspirée du peintre de l’école flamande Jérôme Bosch

Le Jardin des Délices, mise en scène Philippe Quesne © Christophe Raynaud de Lage

Pour cette 77^ème édition du Festival d’Avignon, et première édition dirigée par Tiago Rodrigues, le lieu mythique de la carrière de Boulbon, devenu célèbre en 1985 avec la création du Mahabharata par Peter Brook, fait son grand retour. En effet, il n’avait plus accueilli de spectacle depuis Karamazov mis en scène par Jean Bellorini en 2016.

La nuit tombe dans la carrière, mais le chant des cigales se fait encore entendre, avant de céder sa place à celui des grillons. Au cœur du majestueux et imposant amphithéâtre minéral, un groupe de touristes semblant tout droit sorti d’un soap opera américain des seventies vient garer son bus afin de se livrer à un bien étrange rituel : l’adoration d’un œuf géant, tout droit sorti du tableau de Jérôme Bosch (1450-1516), Le jardin des délices.

Si les interprétations de ce triptyque du maître hollandais varient d’un historien de l’art à l’autre, une chose est sûre : il apparaît en filigrane dans son œuvre le bouleversement radical des repères politiques, moraux et sociaux à la fin du Moyen-Âge et à l’orée de la Renaissance. Dès lors, le spectacle proposé par le Vivarium Studio et mis en scène par Philippe Quesne prend la forme d’une forêt de symboles dans laquelle on déambule, faisant écho aux allégories prémonitoires du tableau de Jérôme Bosch, mais nous plongeant aussi directement dans l’inquiétante étrangeté d’un monde perpétuellement au bord de l’abîme, où tout est à recommencer sans cesse. Nous naviguons ainsi sur une sorte de « Nef des fous », autre motif présent dans l’œuvre de Bosch, où le sens se renverse sans arrêt : descriptions de l’Enfer dantesque au son des cigales et des grillons, moment poétique interrompu par un marteau-piqueur, évocation de l’expérience métaphysique d’un « lavement » en costume tout droit sorti du XV^ème siècle flamand…

Avec sa compagnie le Vivarium Studio, qui fête cette année ses vingt ans, Philippe Quesne sait parfaitement se jouer des codes théâtraux et rebattre les cartes de la dramaturgie afin de proposer une vision poétique et singulière d’une humanité qui danse sans cesse au bord du précipice. Présentant tantôt l’aspect d’un western post-moderne, d’une épopée rétrofuturiste, ou encore d’un film de science-fiction à l’univers décalé, les interprètes orientent le public dans ce labyrinthe flirtant avec le non-sens et parfois même l’humour absurde, tout en prenant un malin plaisir à le perdre parfois, pour mieux le retrouver ensuite. Grâce à un montage de textes intéressant, à la musique jouée en direct et à une utilisation habile de l’espace si particulier de la carrière de Boulbon, ce spectacle restera un des temps forts de la 77^ème édition du Festival d’Avignon.

Le Jardin des Délices, mise en scène Philippe Quesne © Christophe Raynaud de Lage

Informations pratiques

LE JARDIN DES DÉLICES – Création au Festival d’Avignon 2023
Festival IN d’Avignon du 5 au 25 juillet 2023

Textes originaux
Laura Vazquez

Conception, mise en scène et scénographie
Philippe Quesne

Avec
Jean-Charles Dumay, Léo Gobin, Sébastien Jacobs, Elina Löwensohn,
Nuno Lucas, Isabelle Prim, Thierry Raynaud, Gaëtan Vourc’h

Costumes, sculptures Karine Marques Ferreira
Collaboration scénographie Élodie Dauguet
Dramaturgie Éric Vautrin
Assistanat à la mise en scène François-Xavier Rouyer
Collaboration technique Marc Chevillon
Son Janyves Coïc
Lumière Jean-Baptiste Boutte
Vidéo Matthias Schnyder
Accessoires Mathieu Dorsaz
Régie générale François Boulet, Martine Staerk
Régie plateau Ewan Guichard
Régie lumière Cassandre Colliard
Habillage Estelle Boul
Construction des décors Ateliers du Théâtre Vidy-Lausanne
Production et diffusion Judith Martin, Elizabeth Gay (Théâtre Vidy-Lausanne)
Production Charlotte Kaminski (Vivarium Studio)