Article d’Ondine Bérenger
Un conte d’actualité
Demain, une jeune fille nommée Elsa doit être sacrifiée au despotique dragon à trois têtes qui, depuis des siècles règne sur la cité. Lancelot, héros professionnel, arrive chez la demoiselle et, s’éprenant d’elle, défie le dragon pour libérer la population. Mais le peuple est habitué et soumis au tyran, au point qu’il ne cherche plus la révolte…
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Jeu de masques dans un univers de conte revisité, musique originale et scénographie chamarrée contribuent à transporter le spectateur dans un monde fantaisiste et exubérant, intemporel et pourtant d’une grande modernité. Avec un rythme soutenu et des personnages étrangement fous, le récit mêle le rire à la crainte, et l’imaginaire à une réalité douloureuse. Comment tuer le Dragon lorsque le peuple affirme sa soumission ? Pourquoi rester résigné à la tyrannie ? Faut-il un héros pour créer la révolte ? Le texte d’Evguéni Schwartz nous parle et nous interroge sur notre propre responsabilité face aux injustices dont nous nous plaignons. Mais vaincre le Dragon une fois signifie-t-il que les choses vont changer ? De ce point de vue, le tableau est plutôt sombre et révèle, à travers les contradictions de l’âme humaine, qu’un monstre peut surgir en chacun de nous…
Tout au long de la représentation, le public est exhorté, sous la menace, à acclamer le tyran que Lancelot veut vaincre. Par cette implication, on ressent un certain malaise à se laisser porter par la propagande et l’effet de groupe, ce qui ne peut que renforcer la force du message qui nous est adressé.
Avec beaucoup de prestance, les comédiens nous enferment avec eux dans ce monde terrible où l’ambition, l’égoïsme ou l’abandon servent un système qui se repose sur sa propre nécrose. Mais si l’on accepte cette invincible imperfection, peut-être peut-on parvenir à être heureux dans ce monde-là…
Une histoire abordable à tout âge, et pleine de vérité.
Le Dragon
d’Evguéni Schwartz
traduction de Benno Besson
mise en scène Stéphan Debryune
avec Estelle Breton, Guillaume Charbuy, Pierre Devanne, Mélanie le Duc, Mélanie Surian
Accordéon Eric Allard-Jacquin ou Simon Deneuville
Saxophone/Flûte Balthazar Naturel ou Thibaud Merle
Scénographie Suzanne Barbaud
Parolier Yanowski
Création musicale Eric Allard-Jacquin
Facteur de masques Yannick Laubin
Costumes Delphine Desnus
Marionnettes Lucile Beaune
Création Lumière Thomas Jacquemart
du 7 au 30 juillet 2016
Théâtre de l’Oulle
19 Place Crillon
84000 Avignon