Solaris mise en scène Rémi Prin © Avril Dunoyer
Dans la station spatiale d’observation de la planète Solaris, dont l’océan semble posséder une forme de conscience inconnue, les scientifiques sont témoins d’événements surnaturels : des personnes viennent et vont à bord du vaisseau. Lorsque le psychologue Kris Kelvin y retrouve sa femme Harley, décédée il y a 10 ans, il se trouve tiraillé entre ses émotions et son devoir scientifique…
Adapté du roman de Stanislas Lem, le spectacle s’attaque à un genre assez peu exploité au théâtre, celui de la science-fiction. Huis clos dans l’espace, appareillage futuriste, « trucs scientifiques », apparitions surnaturelles, la difficulté technique de représenter ce type d’atmosphère sur scène sans ridicule explique peut-être le manque de popularité de ces œuvres… Il est bien courageux de s’y essayer. Et, à vrai dire, l’exercice – surprenant – est bien réussi ! Cela tient en grande partie aux inventions scénographiques de Benjamin Gabrié et Suzanne Barbaud, qui ont créé des décors modulaires à l’identité visuelle très forte, pouvant représenter tous les espaces du vaisseau selon leur disposition scénique. Ces éléments imposants pour la petite scène de l’espace Saint-Martial permettent de créer un sentiment inquiétant, voire oppressant, de huis clos mystérieux où, à tout moment, quelque chose peut surgir d’une porte ou de derrière un mur. Avec, en prime, des lumières (signées Rémi Prin) qui osent la radicalité et exploitent à merveille les matériaux diffractants ou diffusant des décors, ainsi qu’une création sonore pesante, omniprésente, l’ambiance est tout à fait saisissante. Visuellement, le spectacle est un modèle d’inventivité : on devine le bricolage sous-jacent, à l’instar du costume de cosmonaute fait de bric et de broc, et cependant tout fonctionne parfaitement. Bien sûr, quelques détails nous rappellent que nous sommes au théâtre et nous font parfois sourire, nous sortant un instant de la représentation, mais dans l’ensemble, le pari est tenu.
Solaris mise en scène Rémi Prin © Avril Dunoyer
Il est dommage que la direction d’acteurs ne suive pas avec suffisamment de maestria l’ambition du spectacle pour nous permettre de l’apprécier pleinement. En effet, bien que Louise Emma Morel soit impressionnante d’ingénuité mystérieuse en Harley, et que Quentin Voinot parvienne à camper un Snaut dont l’angoisse suscite notre empathie, il demeure là un léger manque de précision, d’authenticité, qui laisse entrevoir la difficulté du genre : un pas de travers, et la science-fiction perd sa superbe. Et malheureusement, Thibault Truffert, dans le rôle principal de Kelvin, souffre de cet écueil à travers un jeu un peu trop scolaire. Certes, il ne cesse de s’améliorer au fil de la représentation, mais son personnage à l’air toujours renfrogné et sombrant dans la folie à grands renforts de cris agressifs échoue à nous toucher. C’est dommage, car tout le reste y est…
Solaris est un beau travail, courageux, original et plein d’inventivité, qui aurait pu être vraiment exceptionnel… avec quelques ajustements.
Solaris mise en scène Rémi Prin © Avril Dunoyer
Informations pratiques
SOLARIS – Cie Le Tambour des Limbes
Festival OFF d’Avignon du 5 au 28 juillet 2019
Auteur(s)
Stanislas Lem
Traduction Jean-Michel Jasienko, adaptation Thibault Truffert et Rémi Prin
Mise en scène
Rémi Prin assisté de Alexis Chevalier
Avec
Thibault Truffert, Louise Emma Morel, Quentin Voinot et Gabriel Laborde
Scénographie Benjamin Gabrié et Suzanne Barbaud
Création sonore Léo Grise
Costumes Manon Gesbert et Célia Bardoux
Lumière Rémi Prin
Durée
1h30
Dates
Du vendredi 5 au dimanche 28 juillet 2019 à 20h25
(relâches les mercredis 10, 17 et 24 juillet) – Espace Saint-Martial, Avignon
Adresse
Espace Saint-Martial
2, rue Jean-Henri Fabre
84000 Avignon
Informations complémentaires
Espace Saint-Martial
saint-martial.org
Festival OFF d’Avignon
www.avignonleoff.com
Compagnie Le Tambour des Limbes
www.cieletambourdeslimbes.fr