[Biennale de la Danse Lyon] "NOS MATINS INTÉRIEURS" : Entre musique et jonglage, pour un résultat magique

Nos matins intérieurs, mise en scène Nicolas Mathis © Jean-Charles Massera

Parfois, il suffit de la première seconde pour savoir que le spectacle qui va se dérouler sous nos yeux est déjà un coup de cœur. C’est le cas de Nos matins intérieurs, qui offre dès son ouverture une promesse d’émerveillement.

« Dans un dédale de trajectoires individuelles faites d’étincelles et de patience, nous sommes plusieurs à jouer la même musique, intime et universelle. Dévoiler un peu de soi et se fondre dans le mouvement commun pour proposer un monde de jeux, de relations, d’espièglerie et de lyrisme, de musique et de danse. Nous, jongleurs et musiciens, sommes tout autant le paysage que les surprises qui s’y nichent, nous vous offrons notre énergie et les désirs qui nous meuvent. »

Sous l’impulsion du directeur de la 20^ème Biennale de la Danse Tiago Guedes (directeur de la Maison de la Danse), les spectacles proposent de repenser la danse dans un rapport éthique, écologique et solidaire, à travers une large diversité de formes, d’esthétiques et de récits. Pour Nos matins intérieurs, cette diversité s’exprime à la perfection dans la rencontre entre le Quatuor Debussy et le Collectif Petit Travers. Avec leur trente années d’expérience, les musiciens se sont donnés pour fil rouge le partage et le renouvellement des formes, attisant sans cesse surprise et curiosité par une passerelle avec les autres domaines artistiques. Cette année, cette passerelle s’ouvre à une troupe de 10 jongleur.euse.s, mu.e.s par une « dynamique d’ouverture qui nourrit l’écriture du jonglage de l’intérieur ».

De la rencontre entre musique et mouvement naît une fluidité époustouflante. Tout devient chorégraphie : les corps, les balles, les regards, les déplacements. Les deux groupes se mettent en dialogue pour offrir un spectacle éminemment visuel, sublimé par la musique – qui ne manque pas de provoquer chez le public des réactions et applaudissements émerveillés. En effet, il y a quelque chose d’enfantin dans cette danse – car il s’agit bien d’une danse, la musique qui accompagne les jongleur.euse.s rythment leurs jeux et leurs mouvements, donnant souvent l’illusion d’un ballet. On retrouve aussi beaucoup d’humours, d’instants touchants, de parenthèses presque magiques. La lumière qui se projette sur le fond noir transforme l’envol des balles en étoiles filantes (on redevient enfant devant de telles performances).

Et au milieu des danses, des courses et des violons, la parole se libère. Les jongleur.euse.s profitent de l’espace de jeu qui leur est offert pour s’interroger, se confesser sur leurs doutes à la fois personnels et plus larges, qui les touchent d’abord en tant qu’individus avant de devenir une réflexion de groupe. Car l’enjeu de ce spectacle, comme ils le disent eux-mêmes, est de préserver sa singularité au cœur du collectif. Les dialogues intérieurs exprimés par le jonglage prennent leur envol par les mots et deviennent confessions. Ces instants de rétrospective sont aussi l’occasion de proposer des réflexions écologiques et philosophiques, sur le bien-fondé de leur art, sur la place de la beauté dans un monde en perpétuel changement. On revient alors à l’essentiel, on se laisse porter par la musique, pour « faire de la place à l’épanouissement au milieu du bruit et de la fureur. »

Le résultat : une œuvre magique, enfantine et profonde qui mérite son ovation !

nos-matins-interieurs-1_plus-claire-cjean-charles-massera

Nos matins intérieurs, mise en scène Nicolas Mathis © Jean-Charles Massera

Informations pratiques

NOS MATINS INTÉRIEURS – Collectif Petit Travers et Quatuor Debussy
dans le cadre de La Biennale de la Danse de Lyon 20^ème édition du 9 au 30 septembre 2023

Auteur(s)
Julien Clément et Nicolas Mathis

Mise en scène
Nicolas Mathis

Avec les musiciens du Quatuor Debussy
Christophe Collette et Emmanuel Bernard, violons,
Vincent Deprecq, alto, Cédric Conchon, violoncelle
Avec les jongleur.se.s du Collectif Petit Travers Eyal Bor, Julien Clément, Rémi Darbois, Amélie Degrande,
Bastien Dugas, Alexander Koblikov, Taichi Kotsuji, Carla Kühne, Emmanuel Ritoux, Anna Suraniti
Musiques Henry Purcell et Marc Mellits
Texte et direction d’acteurs Jean-Charles Massera
Création lumière Arno Veyrat
Costumes Léonor Boyot Gellibert
Régie générale et lumière François Dareys ou Thibault Thelleire
Régie son Victor Page ou Eric Dutrievoz