"BIG MOTHER", la démocratie est-elle déjà en danger à l’heure du Big data et si la fiction révélait la réalité du monde dans lequel nous vivons ?

Big Mother, mise en scène Mélody Mourey © Alejandro Guerrero

Mélody Mourey se consacre à la création théâtrale depuis 2019, après avoir été rédactrice à l’éléphant pendant six ans. Elle est diplômée de Sciences Po Aix et en psychologie, et elle a suivi un cursus d’art dramatique au conservatoire régional de Toulon puis aux Cours Simon.

Big Mother est sa troisième création avec cinq nominations aux Molières 2023. Ces deux précédentes créations ont aussi joué les prolongations en salle. Il s’agit de : La Course des géants, dont le sujet porte sur la conquête spatiale aux États-Unis, et Les crapauds fous, qui narre l’histoire vraie de deux médecins polonais qui ont sauvé des milliers de vies pendant la Seconde Guerre mondiale.

Ces créations s’inspirent de son cœur de métier le journalisme qu’elle allie et déploie en création théâtrale sur des sujets d’actualité ou en lien avec l’histoire. Elle mène l’enquête.

Sa dernière création interroge le monde dans lequel nous vivons ou sommes plongés, sans forcément en prendre pleinement conscience. Quels dangers les Big Data font-ils encourir à la démocratie, nos libertés sont-elles déjà impactées, menacées ? Une pièce politique menée sous forme d’enquête journalistique au cœur d’une rédaction, au sein du quatrième pouvoir.

Nous sommes ainsi immergés dès l’attente pour ce spectacle dans une longue file d’attente et une salle bondée, le grouillement des grandes villes, le grouillement du monde, la culture de masse. Le rideau rouge, traditionnel du théâtre est baissé, le temps que tout le monde s’installe et trouve place.

Le rideau se lève et changement total d’ambiance. Nous sommes alors plongés dans l’univers du multimédia, cela clignote de partout, à l’image de ce que nous vivons au quotidien avec nos téléphones et les écrans qui nous entourent : le monde numérique, le monde du numérique. Ainsi plusieurs tableaux se déploient sur la scène et ce jeu de tableaux sera au service de l’intrigue pour zoomer sur chaque personnage clé de cette intrigue et la faire avancer. Une scénographie numérique et cinématographique, métaphore de notre société.

Nous sommes au cœur de la rédaction politique du journal « New York Investigation », qui met en ébullition la petite équipe de cette rédaction suite à l’annonce d’une sexe-tape concernant le président américain. Ce journal, sérieux, c’est-à-dire traditionnel, ne peut publier sans avoir vérifié l’info. Fait réel ou fake-news ? La question se pose avant toute diffusion d’informations, car effectivement, nous vivons également dans une société où les informations ne sont pas fiables et peuvent avoir d’autres objectifs que l’information. Il faut vérifier, enquêter et c’est ce que s’apprête à faire cette petite équipe et notamment Julia Robinson, la petite dernière arrivée à la rédaction, qui n’a pas froid aux yeux et est volontaire pour tout. Mais elle est mise à l’écart, en congé, rapidement concernant cette affaire. Elle ne comprend pas, le premier fil de l’intrigue est posé. Et pas possible de publier sur les réseaux sinon la rédaction serait traitée d’activiste. Donc il faut mener l’enquête pour s’assurer de la véracité des faits. Cette intrigue journalistique se dénoue peu à peu au fil des intrigues sentimentales des personnages. Celle de Julia avec son ex, celle de la secrétaire de rédaction, amante du directeur de la rédaction, et enfin celle d’un père et d’une fille, le rédacteur et sa fille.

En toile de fond de cette pièce, un programme de manipulation de masse, celui d’un parti politique, dénommé « démocratie totale » qui a un objectif positif, donner le pouvoir au peuple grâce au numérique, chacun peut réagir par un clic. Un monde où les réflexes plus que la réflexion et la pensée gouvernent les gens. Pas le temps de penser.

Et si nous étions déjà dans ce monde qui menace nos libertés et l’information !

Une pièce dynamique, vive, empreinte d’humour frôlant l’absurde dévoilant ainsi certaines réalités actuelles, dont la manipulation de masse, vers une prise de conscience.

En sortant de la pièce, on ne voit et on ne regarde pas le monde de la même manière.

Une pièce pour réveiller la pensée et réagir.

Le titre de cette pièce reprend la figure métaphorique du programme « Big Mother » du roman d’anticipation 1984 de George Orwell, qui annonce la mise en place d’un régime totalitaire et d’une société de surveillance donc de réduction des libertés.

Sommes-nous entrés dans le programme « Big Mother » ?

Big Mother, mise en scène Mélody Mourey © Alejandro Guerrero

Informations pratiques

BIG MOTHER

Écriture et mise en scène
Mélody Mourey

Avec
Patrick Blandin, Pierre-Yves Bon, Ariane Brousse, Guillaume Ducreux, Marine Llado et Karina Marimon.

Scénographie Olivier Prost
Chorégraphies Reda Bendahou
Création vidéo Édouard Granero
Musique Simon Meuret
Lumière Arthur Gauvin
Costumes Bérengère Roland