« COMBAT DE NÈGRE ET DE CHIENS », un thriller à couper le souffle

Combat de nègre et de chiens, mise en scène Mathieu Boisliveau du collectif Kobal’t © Gilles Le Mao

Il aura suffi d’une nuit pour tout basculer. Une nuit, et quatre personnages enfermés entre quatre murs. Quatre personnages surveillés de près par des gardiens – les spectateurs – impuissants face à leur lutte, suspendus à leurs lèvres, retenant leur souffle jusqu’au bouquet final.

Combat de nègre et de chiens est un thriller. Bernard-Marie Koltès, comme souvent dans son théâtre, emmène ses personnages en Afrique, ici dans un chantier de travaux publics d’une entreprise française. Alboury, un « Noir mystérieusement introduit dans la cité » où vivent les Blancs, est venu réclamer le corps de son « frère », prétendument mort dans un accident de travail, en fait tué d’un coup de revolver par l’ingénieur Cal. Son intrusion coïncide avec l’arrivée de Léone, tout juste débarquée de l’hôtel de Pigalle où elle travaillait pour épouser Horn, le chef de chantier. Ce sont donc quatre personnages, aux individualités marquées et aux objectifs entêtés, qui se retrouvent à jouer au chat et à la souris, enfermés dans la cité.

Sous les lumières du Théâtre des Célestins et sur une scène métamorphosée, Mathieu Boisliveau et son collectif Kobal’t proposent une mise en scène à la hauteur de cette tragédie. Le texte de Bernard-Marie Koltès, comme dans tout son théâtre, est lourd de sens, de suggestions, de répétitions, de lapsus. Dans les nombreux monologues et tirades, il faut s’accrocher aux mots car tout va vite, pour les spectateurs comme pour les personnages. Ces mots sont une porte ouverte à l’introspection, un véritable tremplin de jeu. C’est justement de ce tremplin que se sert Mathieu Boisliveau :
« C’est une machine à jouer pour les acteurs. […] C’est du combat. »

Le jeu que proposent les quatre comédiens est d’une intensité folle. La direction d’acteurs, la mise en scène et les mots se rencontrent et s’allient à la perfection : Mathieu Boisliveau met à mal ses comédiens tout comme le dramaturge met à mal ses personnages. Ils deviennent les représentants individuels d’une humanité salie, malmenée, confrontée à ce qu’elle a de plus sombre. Cette densité de texte et de jeu est rythmée par un humour grinçant propre à l’écriture de Koltès, que s’approprie à la perfection le metteur en scène.

Pour soutenir un tel « combat » – pour reprendre les termes de Mathieu Boisliveau – il fallait créer un espace de jeu à la hauteur du crescendo présent dans l’oeuvre. Pari réussi : le plateau des Célestins est parfaitement exploité par la mise en scène. Le public encercle littéralement les personnages, puisque des gradins sont ajoutés sur la scène. Inclure le public au spectacle est un défi continuel pour le collectif : pour l’équipe, les spectateurs sont partie prenante de la représentation.

La mise en scène réussit à s’emparer d’une pièce coup de poing pour nous proposer un crescendo, de jeu, de lumière, de son, et rendre ainsi hommage au thriller écrit par Koltès.

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Combat de nègre et de chiens, mise en scène Mathieu Boisliveau du collectif Kobal’t © Gilles Le Mao

Informations pratiques

COMBAT DE NÈGRE ET DE CHIENS – Création du collectif Kobal’t

Auteur(s)
Bernard-Marie Koltès

Mise en scène
Mathieu Boisliveau, du collectif Kobal’t

Avec
Chloé Chevalier, Pierre-Stefan Montagnier, Denis Mpunga, Thibault Perrenoud

Scénographie Christian Tirole
Lumière Claire Gondrexon
Costumes Laure Mahéo
Régie générale et son Raphaël Barani
Régie plateau Benjamin Dupuis
Pyrotechnie Raphaël Barani et Claire Gondrexon

Dates
Du 25 au 29 avril 2023

Durée
2h

Adresse
Théâtre des Célestins
4, rue Charles Dullin
69002 Lyon

Informations complémentaires
Théâtre des Célestins
www.theatredescelestins.com


Collectif Kobal’t – Facebook
www.facebook.com/kobalt.cie