Article de Julie Lossec
Une mère et son fils à cœur ouvert
Jaime a été licencié. Obligé de vendre l’appartement qu’il prête à sa mère, il l’informe qu’elle va devoir déménager. Mais pour Mama, hors de question d’abandonner son indépendance en s’installant chez son fils et sa belle-fille qu’elle ne supporte pas. Un bras de fer commence alors entre la mère et le fils sur la table de la cuisine, autour d’un pot-au-feu, tandis qu’en filigrane se lit une magnifique et dernière déclaration d’amour. Au fil de la conversation, Jaime brisé par la crise économique, enfermé dans une relation de couple sans perspective, retrouve auprès de sa mère l’énergie et la dignité nécessaires pour affronter sa vie. Octogénaire moderne et clairvoyante, Mama partage les idéaux révolutionnaires de son nouveau fiancé argentin Gregorio. Elle confronte son fils à sa propre réalité, fait tomber les apparences de sa vie de père de famille rangé.
© Marianne Grimont
Les deux comédiens questionnent la relation mère-fils dans toute sa complexité. Mama prodigue ses conseils à Jaime, sans tabous, avec l’affection parfois envahissante mais salvatrice d’une mère pour son fils. Grâce à une scénographie très soignée, le spectateur plonge dès les premières minutes dans la chaleur argentine du foyer de Mama. Son intérieur est à son image, simple. Deux pans de murs aux tons jaunes se font face de part et d’autre de la scène. En fond, un grand rideau blanc tendu symbolise la frontière avec l’au-delà. Dans la deuxième partie de la pièce, lorsque Mama revient vêtue de blanc pour faire à son fils apaisé un dernier adieu, le décor est inversé et le rideau déchiré. Le spectateur comprend progressivement qu’elle s’en est allée. S’ajoutent à cela des effets sonores et visuels subtilement répartis qui accompagnent les différents rebondissements de la pièce.
© Marianne Grimont
La fin de la première partie semble longue car la conversation devient quelque peu répétitive. Mais lorsque les comédiens reviennent sur scène dans la seconde partie, ils capturent l’attention du spectateur jusqu’à leur dernier tango. Incarnant toute la fougue et la vitalité de Mama, Jacqueline Bir rayonne dans ce rôle. Le duo qu’elle forme avec Alain Leempoel (Jaime) sublime la relation tantôt pleine de tendresse, drôle, tumultueuse et immuable qui lie les deux personnages. Un très bel hommage rendu à toutes les mères.
Conversations avec ma mère
De Santiago Carlos Ovés et Jordi Galcerán d’après le scénario du film Conversationes con mama de Santiago Carlos Olvés
Version théâtrale Jordi Galcerán
Version française Dyssia Loubatière
Mise en scène Pietro Pizzuti
Avec Jacqueline Bir et Alain Leempoel
Scénographie/Costumes Delphine Coers
Lumière Marc Lhommel
Réalisation décor musical Laurent Beumier
Professeur de danse Daniela Lucá
Réalisation vidéo Benoît Gillet avec la participation de Shaï Szyper
Assistant Vincent Vanderbeeken
À partir du septembre 2016
La Pépinière théâtre
7 Rue Louis le Grand
75002 Paris
http://www.theatrelapepiniere.com/