« COPENHAGUE » par Nicolas Vial, une chambre à brouillard sur fond de course à l’armement

Copenhague, mise en scène Nicolas Vial © DR

Armés de lampes torches, un couple déambule dans une salle obscure. La femme et l’homme s’interrogent : Pourquoi Werner Heisenberg, chercheur en physique atomique pour l’Allemagne nazie, s’est-il rendu chez eux en 1941 ? « Eux », ce sont Margrethe et Niels Bohr – l’un des plus grands physiciens qui finira par travailler sur la bombe atomique à Los Alamos. Au travers de boucles temporelles qui se superposent telles des palimpsestes, ces trois grands esprits se rencontrent encore et encore et retracent les différentes versions de cette fameuse soirée qui, depuis lors, a suscité tant d’interrogations chez les historiens, journalistes et scientifiques. Car interroger l’intention de Heisenberg derrière cette visite incongrue c’est avant tout interroger la responsabilité de l’Homme face au progrès technique et physique. Les dates et les chiffres se succèdent, les hypothèses se contredisent, les intentions se brouillent. Nous entrons alors dans un jeu de dits et de non-dits autour des choix et non-choix des scientifiques derrière la création de l’énergie atomique et donc de l’utilisation dramatique qui s’en est suivie. Le passé est-il stable, le futur prévisible, les conséquences évitables ? Les personnages deviennent alors semblables aux fameuses particules de la théorie quantique. Inobservables. Il est dit que les particules intégrées partagent une relation particulière. Elles sont liées l’une à l’autre et forment un tout inséparable où l’état de l’une est dépendant de celui de l’autre. Qui devons-nous alors observer ? Quelles conclusions tirer ? Nous ne suivons pas une logique déterministe mais probabiliste. Nous ne pouvons pas déterminer l’état des choses mais en calculer la probabilité. Et nous demeurons avec cette question : le comportement éthique d’un Homme est-il calculable, quantifiable, identifiable ? Manquons-nous de variables cachées ?

Le texte de Michael Frayn, lauréat du Tony Award pour meilleure pièce, ne manque pas de traits d’humour, ni d’observations fines ou de savoureux passages sensibles. La mise en scène de Nicolas Vial nous laisse cependant un goût de conférence gesticulée sans gesticulations. Ni la scénographie ni l’attitude des personnages n’évoluent, comme piégées dans ces boucles. Les personnages tournent littéralement en rond et il est difficile de les suivre. Les initié·es trouveront sans doute des points d’accroche mais sans pulses, nous n’identifions plus grand-chose et nous perdons dans le brouillard.

Informations pratiques

COPENHAGUE – L’Incroyable Compagnie

Auteur
Michael Frayn (traduction Jean-Marie Besset)

Mise en scène
Nicolas Vial

Jeu
Julie Brochen, Stéphane Valensi, Nicolas Vial
Scénographie Grégoire Faucheux
Lumières Stéphane Deschamps
Son Frédéric Laügt
Collaboration artistique Corinne Paccioni, Jean-Christophe Blondel

 

Dates
Du 3 au 21 mai 2023 au Théâtre de la Reine Blanche, Paris

Durée
1h50

Adresse
Théâtre de la Reine Blanche — Scène des Arts et des Sciences
2 bis, passage Ruelle
75018 Paris

Informations complémentaires

Théâtre de la Reine Blanche — Scène des Arts et des Sciences
www.reineblanche.com