Un article de Thibault David
Trois femmes et un détonateur
Trois femmes, trois religions, trois points de vue. Nous sommes à Tel-Aviv. Le point commun entre ces trois personnes : elles seront toutes les trois présentes au Rishon Lezion, bar dans lequel une bombe va exploser l’année prochaine.
© Sonia Barcet
Je crois en un seul Dieu a vocation à éveiller les consciences. Très peu d’artifices au plateau : une pièce nue, grise, trois portes, et Rachida Brakni, interprétant tour à tour une jeune palestinienne, une professeure de l’histoire juive, et une militaire américaine.
Ces personnages que tout oppose, Rachida Brakni les fait naître par un geste, une nouvelle posture, la voix intacte – juste ce qu’il faut dans le ton pour qu’on puisse suivre la poésie du texte sans jamais se perdre. Un véritable travail d’orfèvre.
Cette apparente simplicité de la mise en scène sert uniquement d’écrin à l’histoire. Le texte de Stefano Massini ne cherche pas à dénoncer ou prendre parti – il n’y aucun jugement dans ses mots, d’une poésie parfois brutale. C’est pratiquement du journalisme, voire de la docu-fiction : plutôt que de proposer une relecture de l’Histoire avec majuscule, c’est trois tranches de vie qu’on nous donne à voir (avec ses paradoxes et contradictions, de l’humain pur jus). La particularité étant que le spectateur a affaire ici au paradigme du Titanic (selon l’expression du metteur en scène Arnaud Meunier) : dès les premières minutes de spectacle, on connait déjà la conclusion. La bombe va exploser, c’est comme ça, on y pourra rien.
La véritable force de la pièce se manifeste alors dans ces trajectoires humaines qui se dérèglent ; la palestinienne apprentie martyr confrontée à la réalité de ses actes ; la professeure juive, humaniste convaincue, traumatisée par un attentat.
On touche alors des instants de grâce en écoutant les peurs, les traumatismes de ces femmes : on en viendrait presque à regretter que ces moments ne durent pas plus longtemps.
Car la bombe va exploser, c’est dit dès le début. Mais voir cette humanité (la plus belle autant que la plus lâche) sur scène est toujours un bonheur.
Je crois en un seul dieu
De : Stefano Massini
Mise en scène : Arnaud Meunier
Avec : Rachida Brakni
Traduction : Olivier Favier, Federica Martucci
Collaboration artistique : Elsa Imbert
Assistanat à la mise en scène et à la dramaturgie : Parelle Gervasoni
Scénographie et lumière : Nicolas Marie
Regard chorégraphique : Loïc Touzé
Création musicale : Patrick De Oliveira
Costumes : Anne Autran
Régie générale : Philippe Lambert
Décor et costumes : ateliers de La Comédie de Saint-Étienne
Du 14 mars au 9 avril 2017
Durée 1h40
Théâtre du Rond-Point
2Bis Avenue Franklin Delano Roosevelt
75008 Paris
http://www.theatredurondpoint.fr/