« ÉLECTRE » de Sophocle et dans « VARIATIONS SOPHOCLE » de Jean-Pierre Siméon, Dressée sur ses ergots de justicière, elle poursuit la malédiction qui frappe les Atrides

Électre dans Variations Sophocle et autres mythologiques grecques de Jean-Pierre Siméon aux éditions Solitaires Intempestifs. Électre dans Tragédies complètes 2 de Sophocle : nouvelle traduction par Irène Bonnaud.

Avec Électre, on est au cœur de la malédiction de Atrides. Sœur d’Oreste, fille d’Agamemnon et de Clytemnestre, et surtout sœur d’Iphigénie, elle pleure la perte de son père assassiné par sa mère et par l’amant de celle-ci.

Les dieux ont condamné les Atrides, suite au banquet morbide qu’Atrée offrit à son frère : un ragoût de la chair de ses enfants. On peut comprendre que c’est là, faute impardonnable et les descendants ne manqueront pas de payer pour leur ancêtre.

Les navires grecs, prêts à embarquer pour Troie, sont bloqués pas l’absence de vent. Les Dieux exigent d’Agamemnon le sacrifice de sa fille Iphigénie. De ce jour date la haine de son épouse Clytemnestre qui abat le père indigne devant ses deux enfants Électre et le très jeune Oreste. L’enfant, confié par sa grande sœur à un précepteur, grandit au loin tandis qu’Électre devient l’esclave du nouveau couple formé par sa mère et Égisthe. La haine d’Électre est inextinguible. Elle ne semble pas ressentir la moindre peine pour la perte de sa sœur Iphigénie, ce qui lui importe, c’est d’invectiver sa mère et son beau-père et d’attendre le retour d’Oreste qu’elle destine au meurtre du couple coupable.
Comme Antigone, Électre a une sœur disciplinée Chrysothémis, image du conformisme, obéissante à ceux qui possèdent la force.

Comme toujours, chez Sophocle, on bavarde beaucoup, de façon que les spectateurs soient bien imprégnés des tenants et aboutissants de la situation. On mesure à quel point ces représentations participaient à l’éducation des Grecs anciens. Siméon, qui s’adresse aux gens d’aujourd’hui, supprime un certain nombre de digressions ou plutôt de commentaires formels. Komos et Stasimons sont très réduits. En revanche, sa version est une adaptation fidèle. Point n’est besoin d’actualiser le langage : Électre est violente, mais son vocabulaire reste celui d’une femme bien élevée. Dans Philoctète, la traductrice a recours à une langue bien plus verte pour traduire la haine du héros à l’égard d’Ulysse. Sans doute Sophocle était-il déjà sensible aux stéréotypes de genre…

Oreste revient donc, utilisant un subterfuge : ses envoyés font croire qu’il est mort, ce qui permet aux assassins de son père, qui se réjouissent, de dévoiler leur bassesse. Ils périront comme ils le méritent ou plutôt, comme les dieux l’ont décidé.
On sait que l’histoire de Atrides ne se termine qu’à la fin de l’Orestie, avec l’intervention d’Héra, son appel à l’état de droit, et la fin du cycle des vengeances. Les Érinyes rentreront sous terre après avoir confié aux humains devenus enfin adultes, le soin d’élaborer les lois de la démocratie.

Électre n’est donc qu’une étape sur ce chemin escarpé de la responsabilité. Mais il faut croire que les humains ne sont pas aussi constants qu’espéré : dès 1995, Ariane Mnouchkine et Hélène Sixsous réveillaient les Érinyes pendant la guerre de Bosnie pour dénoncer les massacres impies.

Variations-Sophocle-et-autres-mythologies-grecques Solitaires Intempestifs

Informations pratiques

Auteur(s)
Jean-Pierre Siméon (Variations Sophocle)
Sophocle (Tragédies complètes 2)

Prix
21 euros (Siméon)
13 euros (Tragédies complètes 2 de Sophocle)

Éditions Les Solitaires Intempestifs
www.solitairesintempestifs.com