Femmes en colère, mise en scène Stéphane Hillel © François Fonty
Femmes en colère est une pièce tirée du roman de Mathieu Menegaux et mise en scène par Stéphane Hillel.
Une femme est jugée pour s’être rendue justice elle-même. L’histoire se tisse autour du récit intime que livre l’accusée, Mathilde Colignon, au public alors qu’en parallèle se déroule la cour d’assises où neuf jurés vont décider de son destin.
Le public devient le confident, le témoin, le complice de cette femme. Rien ne lui est caché, ni son appétit et fantasmes sexuels, ni le fait de s’être rendue elle-même chez ses bourreaux, ni les actes dont elle est accusée.
La pièce traite d’un sujet d’actualité: les agressions sexuelles et le processus judiciaire associé. Que se passe-t-il quand on décide que la justice ne sera pas à la hauteur de ce que l’on a subi ?
En fond de scène, trois magistrats et six jurés tirés au sort vont débattre puis décider du destin de cette femme. Aucune question ni point de vue n’est tabou.
Différentes générations et catégories socioprofessionnelles sont représentées. Les jurés posent les questions et font entendre toutes les réflexions par lesquelles le spectateur peut être traversé.
Même s’il n’y a pas simultanéité de temporalité, ne peut-on pas considérer le geste de Mathilde comme légitime défense ? N’a-t-elle pas rendu justice à d’autres femmes en faisant cela ? à celles qui n’ont jamais osé parler ? N’a-t-elle pas sauvé de futures potentielles victimes ?
Le tempo effréné est donné par l’alternance en avant-scène de l’intimité de Mathilde et en arrière-scène de la séance de la cour d’assises. Seule la lumière change, il n’y a pas de répit pour le spectateur qui est tenu en haleine par ce contraste d’ambiances tout au long de la pièce.
Cela provoque d’autant plus fortement le rire avec les opinions des jurés qui sont poussées certaines fois à leurs extrêmes et caricaturées. Le spectateur est au cœur de la délibération et devient tour à tour soulagé, outré par certaines paroles mais participe indirectement parfois en acquiesçant ou protestant discrètement. Il devient le dixième juré.
L’émotion en est aussi d’autant plus palpable quand Mathilde raconte les moindres détails de son agression et du crime commis. La parole est brute du début à la fin, le spectateur reçoit les moments un peu gênants, un peu trop intimes, un peu trop sanglants ce qui en fait un moment de beauté très pure.
La pièce pose de nombreuses questions très actuelles : à quel prix peut-on se rendre justice soi-même? La sexualité des femmes vue par un homme et vue par une femme.
La place des hommes dans le processus judiciaire: l’accusée n’a été écoutée que par des hommes depuis le début de l’enquête.
Le spectateur apprend aussi de nombreuses notions de droit très intéressantes qui sont rappelées en détails par les magistrats mais aussi certains chiffres concernant les agressions sexuelles: 1 femme sur 8 en France est ou a été victime d’agression sexuelle.
La comédienne Lisa Martino est bouleversante de sincérité dans son récit sans jamais tomber dans le pathos. Elle est une porte-parole forte et engagée pour celles qui n’ont jamais osé parler.
Le spectateur ressort avec une plus haute connaissance du sujet, une réflexion à pousser et un besoin d’engagement supérieur concernant ce thème. En bref, on sort remué.e de ce beau moment.
Femmes en colère, mise en scène Stéphane Hillel © François Fonty
Informations pratiques
FEMMES EN COLÈRE
Auteur
Mathieu Menegaux et Pierre-Alain Leleu
Mise en scène
Stéphane Hillel
Assistante mise en scène Elena Terenteva
Avec
Lisa Martino, Gilles Kneusé, Hugo Lebreton,
Nathalie Boutefeu, Fabrice de la Villehervé,
Sophie Artur, Clément Koch,
Magali Lange, Aude Thirion, Béatrice Michel
Scénographie Edouard Laug
Costumes Camille Duflos
Lumière Laurent Béal
Assistant lumière Didier Brun
Dates
Jusqu’au 1er avril 2023, du mardi au samedi à 21h – matinée samedi 16h à La Pépinière Théâtre, Paris
Durée
1h30
Adresse
La Pépinière Théâtre
7, rue Louis le Grand
75002 Paris
Informations complémentaires
La Pépinière Théâtre
theatrelapepiniere.com