« LA FILLE DU COLLECTIONNEUR »  Nuage de fumée élitiste 

Opérer le basculement des arts plastiques vers le spectacle vivant, pourquoi pas ? L’ennui c’est lorsqu’on sacrifie tout le reste dans le but de conserver uniquement une sorte d’esthétisme plastique. C’est un peu ce qui se passe avec La Fille du Collectionneur. Sans aucun fil rouge clair, Théo Mercier nous invite à pénétrer son univers ultra-personnel. Confrontés à une succession de scènes plus absurdes les unes que les autres, on abandonne rapidement tout espoir de comprendre quelque chose. Une danseuse imite des objets avec son corps, un personnage absurde et presque agressif chante de façon répétitive et difficilement supportable, puis on retrouve la même danseuse dans ce qui semblerait être un atelier, jouant avec on ne sait trop qui dans on ne sait trop quel but. Même si l’esthétique scénographique est notable, la pauvre utilisation des comédiens-danseurs (on ne comprend pas toujours ce qu’ils disent, malgré leurs micros) à l’intérieur bloque toute transmission réelle d’émotions et de sensations. Ça s’agite beaucoup sur le joli plateau, mais rien ne nous parvient.

Théo Mercier tente de transmettre le ressenti d’un traumatisme de l’enfance (réel ou non) au travers d’une représentation plastique de la mémoire, du souvenir. Il utilise le medium d’oeuvres d’art disparues (celle du collectionneur, figure du père) pour raconter l’absence, comblée dans nos esprits par le souvenir. La Fille du Collectionneur devient donc très vite un spectacle qui ne s’adresse qu’à une élite férue d’art contemporain, habituée aux installations et différentes œuvres et performances plastiques et esthétiques de ce domaine, ainsi qu’aux thèmes de réflexion souvent abordés par celles-ci. Le metteur en scène chorégraphe nous présente sa vision sur un sujet dont il omet de nous parler. La scène ne porte qu’une représentation de ses émotions personnelles, une sorte de catharsis intime qu’il a voulu dévoiler au public. Mais sans efforts pour transmettre quoique ce soit. On observe ces situations imaginaires plaquées dans une dramaturgie fumeuse, et tant pis pour la suite si personne ne sait de quoi il s’agit. La Fille du Collectionneur est finalement le fruit d’une réflexion métaphysique très personnelle sur un traumatisme qui l’est tout autant, livré sans aucune prise en compte d’une relation avec le public. On nous impose un peu l’observation de l’intérieur de la tête de Théo Mercier. Cela peut être tout à fait l’objet d’une très belle exposition, mais une esthétique plastique travaillée ne suffit pas pour faire un spectacle qui atteindra ses spectateurs.

On se perd dedans, mais on ne cherche plus à s’y retrouver, on attend que ça passe.

LaFille1
LaFille3
ARM170107-1231-la-fille-du-collectionneur
ARM170107-1711

© Martin Argyroglo

 

Informations pratiques

Conception et Mise en scène
Théo Mercier

Avec
François Chaignaud, Jonathan Drillet, Angela Laurier, Marlène Saldana et Harris Gkekas

Dates
Du 14 au 19 novembre 2017

Durée
1h30

Adresse
Nanterre-Amandiers – Centre Dramatique National
7, avenue Pablo Picasso
92022 Nanterre Cedex


Informations et dates de tournée
www.nanterre-amandiers.com