"JE ME SOUVIENS LE CIEL EST LOIN LA TERRE AUSSI", Une réécriture à quatre mains réussie

Je me souviens le ciel est loin la terre aussi, mise en scène Aurélien Bory et Mladen Materic © Compagnie 111

En 1994 à Toulouse, le jeune Aurélien Bory assiste au spectacle de Mladen Materic, Le Ciel est loin la Terre aussi, une pièce qui fera prendre à sa vie un tournant décisif. Deux décennies plus tard, les deux metteurs en scène décident de reprendre cet interminable voyage sur la mémoire avec poésie, esthétisme et nostalgie du temps passé. Un renouvellement puissant qui soulève de multiples questions : comment une œuvre nous inspire-t-elle ? Quels sont les effets du temps sur nos souvenirs ? Comment réinventer nos sources d’inspiration ? Peut-être trouverez-vous les réponses sur la scène du théâtre Le Monfort.

Un « tableau vivant » serait l’appellation la plus juste pour qualifier l’ambiance visuelle et sonore de cette pièce envoûtante. L’éclairage souvent très contrasté apporte la magie d’un esprit qui tente de retrouver ses souvenirs, avec ses zones d’ombre et de lumière. Sur l’immense toile blanche qui recouvre le fond de la scène se dessinent des ombres chinoises qui se font face, créant peut-être une dualité entre le présent et le passé, la première version de la pièce et la réécriture. Aurélien Bory et Mladen Materic ont choisi de reprendre le décor d’origine : une grande structure mobile en bois accompagnée de ses meubles anciens, de ses portes et de ses fenêtres. On reconnaît bien vite l’ambiance de Noël avec les milliers de petites boules blanches qui tapissent la scène, ainsi que la luge et le sapin illuminé. Que des éléments rattachés à l’enfance, à la famille et à notre quotidien à tous, ce qui en fait finalement un décor universel.

Car c’est un jeu muet, les comédiens sont très expressifs dans leurs gestes et interagissent beaucoup avec le décor. Ils déplacent la structure de bois et les meubles, ou encore glissent et jouent avec les petites boules blanches au sol. Leurs mouvements apparaissent parfois même comme une danse avec leur environnement, accentuant l’aspect graphique de la pièce. Tout est simplement montré à travers divers symboles, comme le père qui tente de faire enfiler une veste d’adulte à son fils (lui-même joué par un adulte) pour signifier que l’enfance est finie et qu’il devrait grandir. Ces souvenirs sont douloureusement communs à beaucoup de personnes : disputes de couples, délaissement d’un enfant, addiction à la cigarette…

Je me souviens le Ciel est loin la Terre aussi pose ainsi la question du temps qui passe, d’une période où l’on est coincé entre le Ciel et la Terre, qui comme le souligne Mladen Materic dans une interview avec Cécile Brochard, sont dans la mythologie grecque Ouranos et Gaïa, parents de Mnémosyne, déesse de la mémoire. Cette mémoire est au centre de la pièce, souvenir d’enfance et souvenir d’un spectacle inspirant. Tout est relié à elle, et tout pousse les spectateurs à leur tour à questionner leur perception du passé.

Je me souviens le ciel est loin la terre aussi, mise en scène Aurélien Bory et Mladen Materic © Compagnie 111

Informations pratiques

JE ME SOUVIENS LE CIEL EST LOIN LA TERRE AUSSI

Conception
Aurélien Bory et Mladen Materic

Mise en scène et scénographie
Aurélien Bory et Mladen Materic

Avec
Aurélien Bory, Haris Haka Resic, Jelena Covic, Mickael Godbille
Composition musicale Joan Cambon
Création lumière Arno Veyrat
Conception technique décor Pierre Dequivre
Construction décors Pierre Pailles, Jérémy Sanfourche, Olivier Jeannoutot
Peinture Isadora De Ratuld
Accessoires Stéphane Chipeaux-Dardé
Costumes Manuela Agnesini
Régie générale et lumière Thomas Dupeyron
Régie son Stéphane Ley
Régie plateau Mickael Godbille, Yarol Stuber-Ponsot