« LA GRANDE MARÉE » de Simon Gauchet, voyage onirique dans les abysses de nos inconscients

La Grande Marée de Simon Gauchet © Louise Quignon

« Essaye de te souvenir, ou à défaut invente », voici les premiers mots qui marquent le début d’une expédition au cœur de nos rêves, initiée par La Grande Marée de Simon Gauchet. Dans ce spectacle d’aventure philosophique, nos imaginaires sont mis à nu, décortiqués sous le prisme de l’engloutissement mythique de l’Atlantide. Évoquée par Platon, cette puissante cité insulaire aurait étendu sa domination jusqu’aux portes d’Athènes, avant de disparaître sous les flots lors d’un cataclysme provoqué par Zeus pour la châtier de son hubris. Traversant les siècles, le mythe de l’Atlantide semble avoir imprégné notre inconscient collectif et forgé notre étrange fascination pour la fin du monde. La Grande Marée s’empare de cette catastrophe légendaire, source inépuisable de songes et d’interrogations, pour en faire le ciment d’une série de rêves entremêlés. Dans notre monde où toutes les terres ont déjà été foulées par le pied de l’Homme, seul le ventre de la mer conserve encore ses secrets à l’abri du regard de l’humanité. C’est peut-être dans les abysses que se trouvent les vérités que nous cherchons encore à propos de nous-mêmes, à l’image de l’Atlantide et de ses mystères submergés. Sous l’impulsion du voyage, les interprètes de La Grande Marée s’inventent explorateurs et nous entraînent dans un périple à la fois onirique et philosophique.

C’est avec beaucoup d’humour et d’exaltation que les quatre comédiens partent à la recherche de l’Atlantide, dans une aventure réflexive à travers des lieux où la réalité côtoie l’imaginaire. De l’île de Santorin à la plaine de Crau, en passant par la baie du Mont Saint-Michel et les grottes marines du cap Fréhel, la question de l’engloutissement et des mystères de l’océan ne cesse de se renouveler sous différents angles de vue. Sur scène, des anciennes toiles peintes d’opéra dessinent les vagues immenses de la mer qui s’abattent, avant de prendre les plis des parois d’une grotte préhistorique, entre eau et terre, rêve et conscience. Les comédiens traversent ces paysages fluides, suivant les traces d’un groupe de philosophes allemands en quête de vérité, entre autres le penseur Dietmar Kamper. Et c’est discrètement, sans que l’on s’en aperçoive, que leurs investigations sur la catastrophe de l’Atlantide se transforment en un plongeon au fin fond de notre inconscient, où gisent telles des épaves nos peurs et nos désirs les plus enfouis.

La Grande Marée se présente comme une véritable quête de la vérité et de l’inconnu. Elle questionne notre désir de découverte qui nous pousse à partir à la conquête d’un monde, même imaginaire, pour essayer d’y trouver quelque chose d’inédit. Mais cette démanche profondément humaine n’est-elle pas source de désillusion ? Faut-il lever le voile sur tout ce qui nous est inconnu, au prix de voir disparaître l’aura de mystère de cette chose qui nous a tant fascinée ? Si l’Atlantique avait réellement existé, voudrions-nous la retrouver ? Serions-nous plus heureux en connaissant la vérité ? La Grande Marée montre ainsi que le mythe de l’Atlantide n’est pas seulement une fiction racontée par Platon pour illustrer une thèse philosophique, mais bien un traumatisme collectif gravé dans l’inconscient de l’humanité. Dans notre monde actuel frappé par le réchauffement climatique et la montée des eaux, l’idée de l’engloutissement de nos civilisations par la mer est la cause d’angoisses mais aussi, selon le psychanalyste Sándor Ferenczi évoqué dans le spectacle, peut-être la cause de désir… Le désir de retrouver l’océan, de nous laisser couler dans l’eau comme on retourne dans le ventre de sa mère. La Grande Marée nous confronte aux travers de notre inconscient qui nous pousserait, paradoxalement, à souhaiter incarner l’Atlantide, c’est-à-dire vivre la fin du monde.

La Grande Marée - Ecole Parallèle Imaginaire
La Grande Marée - Ecole Parallèle Imaginaire
La Grande Marée - Ecole Parallèle Imaginaire

La Grande Marée de Simon Gauchet © Louise Quignon

Informations pratiques

LA GRANDE MARÉE

Auteur(s)
Martin Mongin

Conception et mise en scène
Simon Gauchet

Interprétation
Gaël Baron, Yann Boudaud, Rémi Fortin, Cléa Laizé

Scénographie Olivier Brichet, Simon Gauchet
Collaboration artistique Éric Didry
Assistante à la mise en scène Nathanaëlle Le Pors
Conseiller scientifique Constantin Rauer
Musique Joaquim Pavy

Dates
Du 9 au 24 novembre 2023 au théâtre de la Bastille, Paris
Du lundi au vendredi à 20h, le samedi à 18h, relâche les dimanches

Durée
2h

Adresse
Théâtre de la Bastille

76, rue de la Roquette
75011 Paris

Informations complémentaires

Théâtre de la Bastille
www.theatre-bastille.com