"L’ÉDUCATION SENTIMENTALE" : le courage d’aimer, d’assumer son désir, de Gustave Flaubert, adaptation libre de Paul Emond.

L’éducation sentimentale , mise en scène Sandrine Molaro et Gilles-Vincent Kapps © Pascal Gély

À découvrir au théâtre de Poche du Montparnasse, un petit théâtre, une petite salle toute remplie. Nous nous installons devant une scène ouverte, qui dévoile son décor épuré : un banc d’époque avec deux dossiers. Une pièce pour deux acteurs, se dit-on alors.

La directrice du théâtre, Stéphanie Tesson, nous accueille et expose le thème de l’œuvre de Flaubert et de la pièce : le personnage de l’anti-héros, qu’est Frédéric Moreau. Ce personnage est interprété par Gilles-Vincent Kappas, et vit à une époque historique de changement, période de la monarchie de Juillet à celle de sa chute vers le Second Empire. Un roman qui parle des relations hommes-femmes, de leurs positions dans la société.

Le théâtre de Poche est très attaché aux textes littéraires et à leur transmission, transmission de leurs savoirs et saveurs à partager. Et Flaubert est un des auteurs les plus joués au Théâtre de Poche du Montparnasse

Le choix de cet ouvrage et de sa libre adaptation par Paul Emond, membre de l’Académie royale de langue et de littérature françaises en Belgique, a un sens et est un choix politique. Ce choix de texte permet d’interroger les relations hommes-femmes, de penser leurs mutations, de revisiter l’histoire mais surtout de donner matière au public à réfléchir à ses choix, ses désirs, ses idéaux et ses responsabilités dans un monde en mutation. Subir ou agir, se laisser porter ou ré-agir ?

Le roman de Flaubert est un roman d’apprentissage de l’amour et du désir à un moment de l’histoire mouvementée. Peut-on être éclairé en amour, qu’est-ce qu’aimer, qu’est-ce que le désir et comment la femme est-elle considérée ? Plusieurs portraits de femme sont dressés.

Le roman est mis en scène comme un conte, nous suivons les péripéties amoureuses et sentimentales et intéressées de Frédéric Moreau, ce jeune homme qui oriente ses choix au gré du vent mais que le désir tiraille et qui se résigne à ne pouvoir le vivre. Comme si vivre son désir, c’était mourir, le tuer. Rester dans l’illusion plutôt que vivre. « Nous ne sommes pas condamnés à l’éternel avortement de nos aspirations » Sandrine Molaro et Gilles-Vincent Kapps.

Les deux acteurs jouent tous les rôles, avec une admiration pour leur travail d’incarnation des personnages. Sandrine Molaro personnifie les différentes femmes croisées ou en liaison avec Frédéric Moreau de façon admirable. Quant à Gilles-Vincent Kapps, il épouse avec respect cet être perdu qu’est Frédéric Moreau. Frédéric Moreau nous apparaît alors comme un homme ordinaire. Ainsi, on oublie même qu’ils ne sont pas que deux sur scène mais plusieurs. Leur jeu est dynamique, la langue de Flaubert est respectée dans l’adaptation et le jeu et cela est mis en lumière par la musique qui accompagne les personnages tout au long de la pièce. Une musique créée pour la pièce qui permet de situer le personnage, de faire un pied de nez par moment, de faire rire et d’accompagner le jeu des acteurs. À quelques moments, la musique est peu forte et l’on entend plus les paroles des personnages.

Un spectacle qui permet de découvrir l’œuvre de Flaubert ou de la redécouvrir, une prouesse d’acteurs et d’adaptation libre.

FRA - THEATRE - L EDUCATION SENTIMENTALE

L’éducation sentimentale , mise en scène Sandrine Molaro et Gilles-Vincent Kapps © Pascal Gély

Informations pratiques

L’ÉDUCATION SENTIMENTALE – Compagnie La fiancée du requin

Auteur(s)
Libre adaptation de Paul Emond

Mise en scène
Sandrine Molaro et Gilles-Vincent Kapps

Interprétation
Sandrine Molaro et Gilles-Vincent Kapps

Collaboration artistique David Talbot
Scénographie Esther Granetier
Lumières François Thouret
Musique originale Gilles-Vincent Kapps
Costumes Sabine Schlemmer
Réalisation robe Julia Brochier