« LES FANTÔMES SONT-ILS TOUJOURS DANS DE BEAUX DRAPS ? » Désamorcer la culpabilité grâce au même de Chuck Norris

Parue récemment aux Éditions Théâtrales Jeunesse, la pièce Les fantômes sont-ils toujours dans de beaux draps ? d’Antonio Carmona aborde avec légèreté, mais sérieusement, le problème de la mort et du sentiment de culpabilité. Quatre personnages : le père (Georges) la mère (Clémence) leur fille (Cyann) et l’amie de celle-ci (Ophélie).

Les deux gamines sont des originales, puisqu’elles préfèrent le football aux Barbie et autres suavités réputées féminines. Élèves de CM2, elles ont un petit coin favori dans la cour de l’école pour s’entraîner. Ce jour-là, Ophélie était en progrès « entre Antoine Griezmann et Diego Maradona », mais voilà, au moment où la cloche sonne, un coup de pied puissant et malencontreux de Cyann propulse le ballon dans la rue. Pendant que Cyann se rend en classe, Ophélie se faufile par un trou dans le grillage et se fait renverser par un camion dont le chauffeur était occupé à garnir son sandwich de Ketchup…

Être responsable de la mort de sa meilleure amie, quand on a dix ans, ce n’est pas simple – si tant est que ça le soit à un autre âge – comment se dire sérieusement « ce n’est pas ma faute » ? comment dormir sur ses deux oreilles quand le fantôme revient chaque nuit réclamer son dû d’attention et de remords ? et surtout, comment parler de ce fantôme aux adultes ?

Les mortifications en tous genres n’y feront pas grand-chose : règle de trois, seulement trois bouchées de chaque plat; règle des couleurs : le rouge, comme le sang versé plutôt que le jaune… C’est que ce fantôme envahissant est très exigent. Ophélie diffère son départ; elle n’est ni au paradis, ni en enfer « pour les enfants qui sont morts comme moi, seul le terrain d’entraînement existe » et le Grand Traîneur organise des matchs interminables au cours desquels il faut marquer 777 buts… et pour dîner du Ketchup, seulement du Ketchup. Cyann ne dort plus, Cyann dépérit, Cyann voudrait parler à ses parents mais ceux-ci sont eux-mêmes en proie à l’angoisse car Clémence est harcelée par son chef de bureau comme sa fille est harcelée par le fantôme d’Ophélie.

Il faudra que chacun trouve la force nécessaire pour se libérer. L’humour pourrait bien être un recours : Chuck Norris n’écrit pas de lettre au Père Noël, il lui pose des ultimatums. Cette phase hurlée par Cyann finit par attirer l’attention de sa mère. Chuck Norris peut parler le braille. Chuck Norris seul, sait où est Ornicar… Irrésistible !
Et des mots, on passera aux actes : Clémence se libérera de son supérieur libidineux et sera en mesure d’entendre la détresse de sa fille.
Et le fantôme finira par accepter sa propre mort, avec panache mais en disant une phrase sans queue ni tête. Quand on est fan de Chuck Norris, c’est la moindre des choses.

Voilà une pièce pleine de vie – bien qu’elle traite de la mort – réaliste, pleine de fantaisie, et qui devrait faire du bien à nombre d’enfants atteints du sentiment de culpabilité. Elle n’a pas encore été montée, mais gageons que, quand elle le sera, elle rencontrera un franc succès.

Informations pratiques

Auteur(s)
Antonio Carmona

Prix
8 euros

Éditions Théâtrales
http://www.editionstheatrales.fr