Les yeux grands ouverts, mise en scène Philippe de Monts © Pauline Le Goff
Cela vous est-il déjà arrivé de retourner en famille – chez vos parents, frères et sœurs, maison d’enfance etc. – et de réduire à néant l’adulte que vous avez mis tant de temps à devenir ? Saut temporel et psychologique déstabilisant au plus haut point, l’adolescence que nous avions quittée des années auparavant ressort soudain des abysses de notre personnalité. C’est ce voyage de retour dans le passé que nous offre cette pièce co-écrite par Pauline Cassan et Philippe de Monts.
Nouvellement mariée, Constance entraîne son époux chez ses parents pour organiser leurs trente ans de mariage. La phrase célèbre de Françoise Dolto est projetée comme une fatalité : « Les enfants sont les symptômes des parents ». Non sans hasard, le couple ne parvient pas à avoir un enfant et plonge dans les affres des imagos parentaux de Constance. L’imago est un concept jungien qui désigne les représentations psychiques, souvent inconscientes, qu’un individu a de ses proches, et l’influence de ces représentations sur son rapport à autrui. Piégée dans la toile du déni, Constance affronte alors ces images : plus ou moins illusoires, plus ou moins douces. Elle coupe les cordons, un à un. Rien ne tient plus. La toile s’effondre. Le chaos peut alors laisser place à l’écriture d’une nouvelle histoire d’amour.
Le fondu du nouveau couple dans l’ancien est brillamment souligné par le jeu de ruptures des deux comédien·nes. D’une seconde à l’autre, les interprètes passent du père au gendre ou de la mère à la fille. L’influence de Philippe Caubere, de François de Brauer et d’Elise Noiraud est assumée et visible. On s’y perd sans s’y perdre. Comme il faut. La juste dose pour se laisser happer par le tourbillon confus vécu par les personnages.
S’il devait y avoir un regret, ce serait de ne recevoir de ce conte familial contemporain que des références un peu datées – Freud, Sartre et Dolto. Légère sensation d’être nous-mêmes piégé·es dans une vision appartenant au passé. Ce petit regret est cependant vite balayé par un texte tendre, drôle, poétique et intelligent. La boîte noire du Belleville est parfaite pour ces jeux de passages en huit-clos où l’espace est magistralement maîtrisé. Notre imaginaire peut s’y épanouir sans entraves. Les comédien·nes sont d’une justesse et d’une technicité admirables. La création lumière en clair-obscur accompagne les oscillations entre le paraître illusoire et l’invisible signifiant. Les auteur·trices ont su s’accompagner de merveilleuses plumes et regards. Talent, ingéniosité, sensibilité : tout est réuni pour passer un très beau moment théâtral.
Les yeux grands ouverts, mise en scène Philippe de Monts © Pauline Le Goff
Informations pratiques
LES YEUX GRANDS OUVERTS
Auteur(s)
Pauline Cassan et Philippe de Monts
Mise en scène
Philippe de Monts
Avec
Pauline Cassan, Philippe de Monts
Assistanat à la mise en scène Louise Rebillaud
Regards extérieurs Marie Combeau, Sébastien Bonnabel, Laura Mariani, Laura Leoni, Sarah Bloch,
Alain Guillo, Anne Véronique Didier, Diane Valsonne, Apolline Vangioni, Marie Hennerez,
Christo Ntaka, Dominique Le Juge, Aurore Lapeyre, Maud Simon
Traduction Daphnée Rhea Pelissier
Correction Dominique Le Juge et Louise Rebillaud
Scénographie Pauline Cassan et Philippe de Monts
Conseil en scénographie Raphaël Daguet et Victor Melchy
Décor Mathilde Salaun
Aide à l’écriture Elise Noiraud, Léonore Confi no, Catherine Schaub, Laura Mariani, Géraldine Nicolo
Création lumière et sonore François Duguest
Design Cedric Rontex
Conseil design Jacques Tehenhauts
Chorégraphie Julia Palombe
Costume Michel Dussarat
Photographie Clara Diebler et Sébastien Bonnabel
Dates
Du 1er septembre au 30 novembre 2023 au Théâtre de Belleville, Paris
Septembre & Octobre : Mercredi et Jeudi à 21h15, Vendredi et Samedi à 19h, Dimanche 15h
Novembre : Mercredi à Samedi 19h, Dimanche 15h
Durée
1h25
Adresse
Théâtre de Belleville
94, rue du Faubourg du Temple
75011 Paris
Informations complémentaires
Théâtre de Belleville
www.theatredebelleville.com
