« La Louve », mise en scène par Daniel Colas, au théâtre La Bruyère

Article de Paula Gomes

Coulisses du pouvoir : la détermination d’une mère face à la fougue de la jeunesse

Sur le velours rouge, un immense miroir repose en fond de scène, encadré par deux chandeliers. Le coryphée présente avec malice le chœur en costumes renaissance, en son centre François d’Angoulême, le futur roi de France. De la tragédie antique à la comédie de la vie, les protagonistes vont remonter le temps en 1515, avant la célèbre bataille de Marignan, là où le destin d’un des plus grands monarques s’est scellé. Le roi Louis XII vient d’épouser Marie Tudor, jeune princesse d’Angleterre. François, son gendre n’a d’yeux que pour elle, délaissant sa femme Claude, boiteuse et disgracieuse de surcroît. Va-t-il compromettre ses chances d’accéder au trône ?

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© Lot

À la cour, Louise de Savoie veille telle une louve sur l’avenir de son fils, calmant ses ardeurs, l’éloignant du danger et établissant de multiples alliances. Seule ombre au tableau : la reine Marie serait-elle « grosse », donnera-t-elle un héritier mâle à ce souverain vieillissant ? Redoublant d’attention, la Louve use de toutes ses armes (foi, charme, ruses et affrontements) et s’entoure de précieux complices pour conduire François jusqu’au pouvoir suprême. Dans les demeures royales, des fêtes somptueuses à l’intimité du lit : passions, vanités et une lutte acharnée où chacun défend ses intérêts au risque de tout perdre ! Traitée avec intensité et légèreté, cette comédie entraînante fait miroiter les sentiments et les âmes, de l’abandon à la pleine conscience, toutes les facettes de l’être humain. Des personnages attachants et une Histoire authentique ponctuée d’anecdotes qui par bien des aspects résonnent au présent.

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© Lot

Cette nouvelle création de Daniel Colas s’intéresse de nouveau à l’Histoire et plus précisément au rôle décisif d’une mère dans l’accession de son fils, François 1er au trône, malgré les débordements amoureux de ce dernier. La condition des femmes à la Renaissance est évoquée en filigrane : mariées jeunes, elles assurent la reproduction et les tâches domestiques ou sinon elles sont envoyées au couvent. Selon la loi salique, la femme ne peut monter sur le trône, ni transmettre la couronne. Seule la régence permet aux femmes de régner seules sur le royaume, ce que fera brillamment Louise de Savoie. Pouvoir et amour à préserver ou à conquérir ? Espionnage, simulations, mysticité, déclarations enflammées, devoir conjugal…, tous les coups sont permis. Au fil des scènes, les individus se dévoilent avec toute leur complexité.

Béatrice Agenin est une Louve majestueuse et déterminée face à la candeur et aux élans amoureux du jeune prince, brillamment interprété par Gaël Giraudeau. Patrick Raynal est un roi Louis XII attendrissant. Un jeu énergique et fluide où les comédiens passent de la gravité à la désinvolture avec aisance. Ils dessinent de superbes tableaux devant le miroir, vêtus des remarquables costumes de Jean-Daniel Vuillermoz. La scène épurée suggère les lieux par le simple déplacement des chandeliers et l’éclairage : douceur de la chambre ou éclats de fêtes. Aller-retour dans le temps, le spectateur reste captif à cette succession d’intrigues drôles ou graves dans le dédale des châteaux. La réalité dépasse la fiction et ne manque pas de nous surprendre : un grand moment de toute beauté.

 

 

 

La Louve – Création Septembre 2016

Texte et Mise en scène  Daniel Colas

Avec

Béatrice Agenin, La Louve

Gaël Giraudeau, François 1er

Coralie Audret, la Reine Marie

Maud Baecker, la Reine Claude

Yvan Garouel, le Bègue

Adrien Melin, Suffolk

Patrick Raynal, le Roi

 

Assistante à la mise en scène  Victoire Berger-Perrin

Costumes  Jean-Daniel Vuillermoz

Décor  Jean Haas

Lumières  Kévin Daufresne

Musique  Sylvain Meyniac

 

À partir du 2 septembre 2016

100 représentations excetionnelles

 

Théâtre de la Bruyère

5 Rue la Bruyère

75009 Paris

http://www.theatrelabruyere.com/accueil/index.php