« MÉMOIRES PARTAGÉES DES 3000 DERNIERS JOURS » de Nadia Vadori-Gauthier, La danse comme une chance

Mémoires partagées des 3000 derniers jours de Nadia Vadori-Gauthier © DR

Le samedi 25 mars 2023, Nadia Vadori-Gauthier nous livre un spectacle interactif dans l’esprit de sa danse. Le lien avec le spectateur s’ancre dans une relation au quotidien pendant 3000 jours depuis les attentats de janvier 2015 avec la 3000^ème danse le samedi 1^er avril où Nadia passe le relais à d’autres chorégraphes du monde entier. Sa personnalité irradie dans ce challenge de longue durée dans un espace toujours plus grand. Nous pouvons parler d’une irrigation qui régénère un monde qui a bien changé depuis 2015 avec l’épisode inédit du confinement où le projet trouvait une place opportune.

Samedi 25 mars, l’univers spatial de la minute dansée par Nadia Vadori-Gauthier dans le projet Mémoires partagées des 3000 derniers jours et celui du spectateur qui peut donner une date marquante entre le 7 janvier 2015 et le 25 mars 2023 se télescopent dans l’espace et le temps d’une mémoire partagée.

En alternance avec une date proposée dans la salle et celle écrite avant l’entrée (journée marquante pour le spectateur et les raisons), M. Mémoire, Jean Hostache, danseur/chorégraphe par ailleurs, retrouve la photo de la danse et de son lieu de la date sélectionnée sur grand écran avec DjREÏNE, en live ainsi que la voix de Nadia. Sa danse est plus un leitmotiv qui lie les différents éléments comme sa parole improvisée peut le faire habilement. En effet, son art est à l’écoute du monde qui l’entoure et elle parle de danse sismographique qui prend les vibrations de l’univers humain, minéral, végétal et aquatique. Ainsi, l’ouverture est grande, ambitieuse dans les liens qu’elle tisse et profondément humaine.

Des oppositions de lieux telles que les steppes d’un spectateur avec un lieu parisien, une laverie où Nadia émerge d’une machine provoquent la surprise et/ou les rires,… Une spectatrice fête ses cinquante ans au bord de l’océan, repris dans une acceptation plus large: on peut avoir son océan à Paris, être accompagnée d’humains ou de non humains pour fêter un événement. Après une première proposition très forte autour du nirvana d’une journée particulière, naissance, rencontre amoureuse, mariage, décès sont très souvent évoqués avec très peu de journées/échecs. M. Mémoire a son vestiaire où il pioche des tenues comme autant de combinaisons possibles ôtées et mises avec grâce et légèreté.

Le samedi 1^er avril, dans leurs deux « impromptus » chorégraphiques n°1 et n°2, au foyer de la danse, les danseurs et danseuses sont rarement sur la scène qui les séparerait des spectateurs. Ces derniers sont inclus en cédant le passage lorsque la vague chorégraphique se diffuse dans la foule qui constitue une seconde vague qui recule. Pour autant, certains effleurements se créent, une main de spectatrice posée sur un danseur immobile qui l’interpelle particulièrement du regard.

À 18h40, une table ronde est organisée sous le signe de la rencontre avec le public « Danser au cœur du Monde ».

L’animatrice Joanne Clavel parle de pratiques somatiques dans lesquelles le corps est relié à l’esprit. L’individu fait vibrer son corps comme un sismographe à l’écoute de son environnement. Le corps cherche à faire signe de langage, à tracer et figurer les murmures du monde. La danse « in situ » est pensée comme un milieu. L’histoire des 8 dernières années se lance dans l’espace d’une composition instantanée, construite par une communauté de pratiques et de spectateurs. La discipline des pratiques quotidiennes sur un temps long s’engage dans un quotidien politique imperceptible. La variété d’exploration des milieux aboutit à un protocole de transmission à l’écoute des changements comme autant de boutures dans différents terreaux.

Nadia Vadori-Gauthier présente sa minute de danse par jour comme une adresse au monde qui dans l’avenir se distillera avec d’autres chorégraphes d’ici fin 2024 au moyen d’un post une fois par jour, dans la mise en perspective de 10 années en 2025.

Brigitte Seth dirige une compagnie de théâtre et de danse (« théâtre qui danse ou danse qui joue ») à travers des langues et des générations différentes avec Roser Montlló Guberna entre Paris et Barcelone en juillet prochain.

Daniel Larrieu, (« théâtre de la danse ») est curieux d’autres pratiques, dans un processus de vibrations dans le geste urbain (Maison des métallos) ou celui de la nature, devant le lac Léman avec la fonction de l’eau, mémoire des hommes et du monde (du 1^er novembre au 5 novembre 2023).

Marion Lévy, chorégraphe/danseuse (théâtre et danse) directrice de la compagnie « romancière du mouvement » en résidence en Bretagne, se projette dans un moment présent sans trop de préparation.

Kaori Ito, chorégraphe/danseuse et animatrice auprès d’enfants à handicap fait ses débuts de directrice à Strasbourg en écoutant les conseils des enfants. L’art de la réparation de la céramique est la métaphore de sa pratique. Plus il y’a de failles, plus il y’a d’or pour les combler. Kaori Ito a pour projet de faire danser des gens du bureau et de s’appuyer sur les secrets d’enfants de maternelle d’environ 4 ans au Japon avec l’image de la mante religieuse qui va sauver le monde ou celles du tsunami et du tremblement de terre.

Cécile Proust, chorégraphe/danseuse qui a fréquenté l’école de Bruno Latour s’oriente vers des problématiques autour de la femme et des migrants entres autres. La qualité somatique de l’âge l’intéresse dans ce que l’âge apporte à la danse. Sa résidence sera à Château-Thierry.

Anne Dreyfus, ancienne chorégraphe/danseuse dirige le « générateur » aux projets artistiques poreux et ouverts avec un festival de performances du 10 au 14 octobre 2023. Elle souligne la discipline exceptionnelle de Nadia qui ajoute qu’on colmate avec de l’or dans les interstices de la violence du monde pour reprendre l’image de Kaori Ito. Elle pense que quelque chose est à jouer par le sensible et que les lieux de la Minute de danse ne seront plus jamais les mêmes. Le projet commence dès demain au Mexique.

À 19h50, Théo Lawrence présent aussi lors de la soirée du 25 mars 2023, offre le « Mini-concert live 3000 Dances et autres chansons ».
Ensuite, le tournage de la Minute de danse n° 3000 avec Nadia Vadori-Gauthier et les chorégraphes/danseurs présents fut très émouvant et applaudi dans cette passation de la minute de danse avant le lancement à 20h30 de la DJ set.

Tout au long de la soirée, le spectateur pouvait enregistrer sa propre Minute de danse, seul ou à plusieurs avec la diffusion en direct sur l’écran du foyer et regarder les vidéos de Minutes de danse du premier confinement (réalisées en réponse à l’appel à danser ouvert à tous lancé par Nadia Vadori-Gauthier en mars 2020) et une sélection de Minutes de danse de Nadia Vadori-Gauthier au cours de ces huit années (uneminutededanseparjour.com).

Mémoires partagées des 3000 derniers jours de Nadia Vadori-Gauthier © DR

Informations pratiques

MÉMOIRES PARTAGÉES DES 3000 DERNIERS JOURS – Cie Le Prix de l’Essence
Chorégraphie Nadia Vadori-Gauthier
Avec
Jean Hostache dans le rôle de La Mémoire, DjREÏNE et Théo Lawrence

Durée 1h20

Le 25 mars 2023 à 19h30 au théâtre national de la danse de Chaillot, salle Firmin Gémier

DANSE 3000 – Cie Le Prix de l’Essence
Conception Nadia Vadori-Gauthier avec la compagnie le Prix de l’Essence
Avec
Margaux Amoros, Marius Barthaux, Pauline Bayard, Juliette Bettencourt, Louise Buléon, Thomas Bleton, Joanne Clavel, DjREINE, Anne Dreyfus, Jean Hostache, Lucas Hérault, Kaori Ito, Daniel Larrieu, Théo Lawrence, Marion Lévy, Roser Montlo Guberna, Simon Peretti, Cécile Proust, Brigitte Seth, Nadia Vadori-Gauthier, Thierry Vandersluys, Liam Warren
Durée 3h
Le 1^er avril 2023 à 18h15 au Foyer de la Danse

Adresse
Théâtre national de la danse de Chaillot
1, place du Trocadéro
75016 Paris

Informations complémentaires

Théâtre national de la danse de Chaillot
theatre-chaillot.fr

Cie Le Prix de l’Essence
www.leprixdelessence.net