« La nuit juste avant les forêts » de Bernard-Marie Koltès, mise en scène Jean-Pierre Garnier au Théâtre de Poche-Montparnasse

Article de Richard Magaldi-Trichet

Voyage au bout de la pluie…

Un garçon tente de retenir par tous les mots qu’il peut trouver un inconnu au coin d’une rue, un soir où il est seul, seul à en mourir. L’accroche du spectacle est mystérieuse. Son déroulement est extraordinaire. Extraordinaire pour nous emmener dans son univers poétique malgré la solitude et le cri dans la nuit du personnage. Extraordinaire pour Eugène Marcuse, ce jeune comédien qui s’approprie cette longue phrase de Koltès de soixante-cinq pages et la décline devant nous aussi bien avec son corps qu’avec ses mots.

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Eugène Marcuse est présent sur scène à l’entrée des spectateurs, déjà imprégné de cette pluie qui n’arrêtera pas de tomber. Tous ses mouvements sont de grands élastiques dans lesquels il se « laisse prendre et reprendre ». Le noir de fin laisse sur nos pupilles les images de ce corps en manque d’affection, de rencontre, de l’autre, quel qu’il soit.

Le texte de Koltès a déjà presque quarante ans, et son actualité est malheureusement étonnante et désolante. Les mots du dramaturge sont comme des cailloux aux arêtes coupantes, Eugène Marcuse nous les balance avec un phrasé et une énergie bien ciselés, il s’écorche avec, et nous par la même occasion. La longue phrase construite sur une structure cyclique, inspirée des fugues de Bach, revient à nous dans un ricochet dramatique parfaitement mis en scène par Jean-Pierre Garnier.

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L’ambiance sonore, à peine audible et pourtant tellement présente, le jeu avec les lumières dépouillées, toute l’ambiance de cette nuit est suggérée à notre imaginaire avec une force étonnante.

Voilà un drôle de voyage qui nous laisse transis, mais heureux d’avoir fait une belle rencontre.

 

La nuit juste avant les forêts

de Bernard-Marie Koltès

mise en scène Jean-Pierre Garnier

Avec Eugène Marcuse

Scénographie et lumière Yves Collet

Collaboration artistique Olivier Dote Doevi

Travail du mouvement Maxime Franzetti

Création sonore Joncha

 

jusqu’au 7 janvier 2017

 

Théâtre de Poche-Montparnasse

75 Boulevard du Montparnasse

75006 Paris

www.theatredepoche-montparnasse.com