Article de Pierre-Alexandre Culo
Sous nos pieds vibre l’art.
Un festival souterrain s’installe dans le terreau fertile du théâtre des Amandiers. Welcome to Caveland. Un dédale de galeries que vont investir création jeune publique, parade, installations et autres propositions, qui creusent ensemble une invitation à découvrir les possibilités d’un monde en deçà du sol. Conçu à la suite de La Nuit des taupes qui ouvre la première soirée du festival, Philippe Quesne propose un rassemblement où la magie fantasmagorique des cavernes promet d’opérer.
© Martin Argyroglo
Des marécages de Swamp Club, créé en 2013, surgissait la figure hilarante d’une taupe, emblème d’un centre d’art en menace de fermeture. Emblème, une Marianne à l’étrange physionomie guidant les artistes vers la lumière, ou plutôt, dans le terreau créatif des cavernes. Au bout de ce tunnel, La Nuit des Taupes surgit dans l’espace de Caveland où vivent sept taupes géantes. Animal pourtant solitaire, elles bâtissent un espace à l’écart du monde, une mise en recul commune qui fait trembler la perception de notre monde extérieur. Ces tentatives de replis sécuritaires forcées par les catastrophes sociales, martiales et humanitaires qui sévissent en pleine lumière. La Nuit des taupes est une bombe politique dans les yeux de celui qui veut s’habituer à l’obscurité.
© Martin Argyroglo
Cette communauté de taupes géantes est ludique, au point d’atteindre un absurde dangereusement contemporain. Créatrice d’arts-premiers, les taupes découvrent les prémices de l’art rupestre, musical et déploient les découvertes candides et fantasmagoriques de l’art. Des marécages où l’art tendait à disparaître, ces taupes en redécouvrent son attraction hallucinatoire. La nuit des taupes n’échappe pas aux caractéristiques du Vivarium Studio de Philippe Quesne. Il est donné à observer une communauté qui se constituent. De ce non-jeu, de cette mutation de l’espace se créent des espaces oniriques une nouvelle fois hallucinant. Une bâche transparente tendue par des taupes ressuscite la caverne de Platon où se projettent des molécules d’eau colorées, qui se broient, se contaminent, fusionnent dans une explosion chromatique. Des ombres de taupes dévorant des lombrics en émergent, derrière où devant cette bâche pauvrement suspendue. Réalité ou invention, Philippe Quesne réussit encore une fois à fasciner par sa maîtrise esthétique.
La Nuit des taupes
conception Philippe Quesne
avec Yvan Clédat, Jean-Charles Dumay, Léo Gobin, Erwan Ha Kyoon Larcher, Sébastien Jacobs, Thomas Suire, Gaëtan Vourcth
costumes Corine Petitpierre assistée d’Anne Tesson
collaborations dramaturgiques Léo Gobin, Lancelot Hamelin, Ismael Jude et Smaranda Olcese
collaboration artistique et technique Marc Chevillon, Yvan Clédat, Élodie Dauguet, Abigail Fowler, Thomas Laigle
Du 5 au 26 novembre 2016
Théâtre Nanterre-Amandiers
7 avenue Pablo Picasso
92000 Nanterre
http://www.nanterre-amandiers.com