« OGRES »  Un puzzle nommé Homophobie 

Yann Verburgh et Eugen Jebeleanu nous invitent à traverser une forêt où derrière chaque tronc se cache un visage de l’homophobie. De la victime au bourreau, du commentateur au décisionnaire politique, ces multiples visages forment un puzzle monstrueux dont on constate avec douleur l’assemblage parfait. Ogres offre son horreur comme un rappel, un constat entre la sensibilité du témoignage et l’objectivité anthropologique, un combat mythique entre l’amour et la haine.

Kampala – Rouen – Athènes – Moscou… Nombreuses sont les destinations qui révèlent leurs actes homophobes avec plus ou moins de brièveté. L’intolérance – la haine – le rejet – la cruauté – la sadisme … Nombreux sont les termes qui appartiennent à ces actes qui se développent et se diversifient d’une frontière à l’autre, du verbe au geste, avec la même graine de violence. A l’intérieur de ce tour touristique terrifiant, l’histoire particulière et intime de Benjamin et Yoan rythme et ponctue le voyage. Dans une forêt de Rouen où se tient un lieu connu de drague masculine, Benjamin est retrouvé brûlé, torturé, l’anus lacéré par une branche. Yoan, militant LGBT, l’accompagne jusqu’au procès qui incriminera après des années de liberté ses agresseurs. Le texte de Yann Verburgh alterne avec justesse entre l’amour intime et l’oppression ogresque qui les entoure. Cette alternance nécessaire transparaît peu sur un plateau où les corps se tiennent à distance les uns des autres, raidis par un investissement dramatique et émotionnel souvent trop important. Si l’on parle d’amour, si les spectateur.trices. en désirent et nécessitent, il est difficile d’en ressentir la chaleur et les palpitations.

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© Geoffray Fages

A l’exemple des héro.ïne.s de conte, la mise en scène d’Eugen Jebeleanu gagne en maturité le long du chemin et se dévoile dans toute sa beauté tardivement. Les choix du metteur en scène se cachent fréquemment dans des zones d’ombre, de flottement et d’indécision. Ogres reste toutefois une création solide qui mérite largement le déplacement. Radhouan Leflahi et Claire Puygrenier dévoilent une partition exemplaire, se métamorphosant avec fluidité et sans fin d’un personnage à l’autre, se déplaçant avec facilité de l’agressé.e à l’agresseur.euse.

 Ogres est une pièce engagée qui échappe au simple didactisme de la revendication. Yann Verburgh et Eugen Jebeleanu ont réussi à écrire un spectacle qui parle de l’humain, pour l’humain, pour cette utopie ‘folle’ d’un monde sans différence. 


Informations pratiques

Auteur(s)
Yann Verburgh

Mise en scène
Eugen Jebeleanu

Avec
Gautier Boxebeld, Clémence Laboureau, Radouan Leflahi, Ugo Léonard, Claire Puygrenier

Dates
Du 22 septembre au 7 octobre 2017

Durée
1h20

Adresse
Théâtre Ouvert
4 bis Cité Véron
75018 Paris

http://www.theatre-ouvert.com