« ONEGUINE » Pouchkine au creux de l’oreille

Eugène Onéguine, lassé par la vie frivole qu’il mène à Moscou, déménage loin dans le pays. Il y rencontrera Tatiana, folle amoureuse de lui, et son meilleur ami, Lenski. Il les perdra tous les deux, et nous n’en dirons pas plus. Eugène Onéguine est une œuvre majeure de Pouchkine. Roman en vers, bercé par les paysages de la Crimée et du Caucase, à la langue magnifique (superbement traduit par André Markowics, par ailleurs), il est superbement adapté ici.

Dispositif bi-frontal, les spectateurs sont invités à se placer et s’équiper d’un casque audio. La quasi-totalité du spectacle se fait au micro – l’occasion rêvée pour les comédiens de jouer avec les vers et leurs voix. On entend le poème, une composition musicale inspirée de l’opéra Eugène Onéguine de Tchaïkovski, des bruitages live – à la bouche, avec le décor, rien de spectaculaire, mais plutôt très proche, comme si ce spectacle n’était destiné qu’à nous.

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Une intimité remarquable : un sujet énorme –on parle quand même d’un monument de la littérature russe – qu’on nous donne comme une friandise, comme un bijou précieux. A ceux qui s’inquiètent, rassurez-vous : Onéguine est un spectacle léger. Les comédiens donnent le ton d’entrée de jeu : entre chaque bloc de texte, un moment de pause pour les oreilles – on retiendra notamment cet exercice génial de massage des lobes. Monument de la littérature d’accord, mais ça n’oblige pas à se prendre au sérieux. De toute façon, l’amour de ces vers, de cette langue, transpire partout : dans la joie que prennent les comédiens à s’emparer du texte, la scénographie simple (deux tables, un piano, des verres et des bougies) qui nous emmène pile au bon endroit, des instants de pureté chez cette Tatiana qui s’anime enfin.

Des défauts ? Si on veut, et encore, c’est discutable. Onéguine est un spectacle qui repose sur ses vers. Ceux qui sont allergiques au verbiage pourraient s’ennuyer. D’autres pourraient se demander si l’aspect audio n’est pas trop gadget. Ou encore, pourquoi se déplacer au théâtre quand on pourrait simplement écouter un audiobook chez soi. Ceux-là, on leur répondra d’aller voir le spectacle, eux aussi. Onéguine doit se voir pour bien être entendu.

Informations pratiques

Mise en scène
Jean Bellorini

Auteur
Alexandre Pouchkine, traduction de André Markowics

Avec
Clément Durand, Gérôme Ferchaud, Antoine Raffalli, Matthieu Tune, Mélodie-Amy Wallet

Composition sonore
Sébastien Trouvé et Jérémie Poirier-Quinot

Dates
du 23 mars au 20 avril 2019
 

Durée
2h
 

Adresse
Théâtre Gérard Philipe,
59, boulevard Jules Guesde, 93200, Saint Denis
 

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