« Promesse à la poussière » de Dashiell Donello aux Éditions Édilivre

Article de Bruno Deslot

Une ode à la vie

Dans un cimetière marin, seul au pied d’une stèle, Lucien s’épanche sous un parasol, adressant ses paroles pleines d’amour à celle qu’il a aimée, celle qui, sous terre, respire la vie par la voix d’un homme aux interrogations en apparence simples, mais révélant in fine l’absurdité de toute une vie et bien plus encore.

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Après un réveil douloureux, Lucien croit avoir fait un rêve, mais il est bien à côté de son aimée, celle dont il énumère les objets lui ayant appartenu, esquissant ainsi le versant de toute une vie le long de laquelle il s’accroche malgré la longeur de la pente parfois vertigineuse. Entre la vie et la mort, les glissements de terrain sont nombreux, la roche souvent érodée dessine une topographie accidentée dans laquelle Lucien se perd parfois bien malgré lui. À force de remettre à demain ce qu’il aurait pu faire le jour même, il se penche sur sa vie, sa petite vie, sa courte vie, sa modeste vie. Il s’adresse à la criarde non pour lui montrer sa peur mais pour se confier, sans détour et lui montrer à quel point pour lui la vie est une expérience sans cesse renouvelée et n’est qu’un commencement chaque jour que Dieu fait. L’amour pour son épouse, la réverbération de sa silhouette à cause de l’éclatement de mille morceaux de miroir, le galure que porte Lucien et tant d’autres objets qui l’entourent ont la vie bien plus longue que la nôtre. Le soleil illumine la stèle à côté de laquelle se trouve Lucien, s’interrogeant sur le sens de la vie, mais « Il n’y a rien de nouveau sous le soleil. », vanité des vanité tout est vanité. Une référence à l’Ecclésiaste ? Les 4 éléments sont évoqués tout au long de la pièce, soit par le souvenir, soit par les interrogations de Lucien qui, par un jeu de bascule, cherche à infirmer ce qu’il tente d’affirmer. En apparence, toute la complexité de cette fable repose sur le non-sens mais au fil des répliques, le lecteur découvre la richesse intarissable d’une proposition convoquant les figures de la mythologie, de la Sainte Bible, de l’Histoire, du théâtre…pour filer la métaphore du temps qui passe et toute sa fragilité.
La notion de durée demeure en suspens et place Lucien dans une solitude aussi angoissante que rassurante car il n’est pas seul, mais au contraire, bien entouré. D’une présence proche, d’une éloquence attachante, son aimée est là et il lui adresse ses souvenirs sentimentaux, matériels…pour mieux ancrer le propos dans une réalité quasi palpable. L’odeur de la poussière est omniprésente, nous rappelant ainsi que nous ne sommes que poussière avant de retourner à la terre.
Dans une langue sculptée au couteau, l’auteur esquisse des tableaux aux champs sémantiques colorés, où le verbe semble danser au rythme d’une musicalité polyphonique. Les voix sont multiples et retentissent comme des salves à mesure que Lucien progresse dans ses pérégrinations, ses promenades solitaires durant lesquelles il se livre, avec pudeur et amour, à sa tendre et bien aimée, mais aussi à l’humanité tout entière.
Cette ode à la vie est une invitation au voyage, une réflexion simple et juste sur la condition humaine qui entraîne le lecteur vers un au-delà riche en émotions et bouleversant de sincérité.

Promesse à la poussière
De Dashiell Donello

Aux Éditions Édilivre
175 Boulevard Anatole France
93200 Saint-Denis
http://www.edilivre.com/