Article de Richard Magaldi-Trichet
Je suis prête pour mon gros plan Monsieur Racine…
Telle une funambule sur le fil imaginaire d’un alexandrin, Anne Delbée s’avance et compte avec nous les pieds pour en restituer tout leur fragile équilibre. En apesanteur déclamatoire (presque), durant tout le spectacle, elle nous dévoile son écriture comme une déclaration d’amour au grand dramaturge français du XVIIe siècle.
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Dans la Grèce antique la tragédie sert à représenter un grand malheur arrivé à un personnage célèbre. Comme Melpomène la muse du genre, Anne Delbée nous conte l’histoire de Racine et de sa légendaire Phèdre. Tous les personnages de l’illustre écrivain se mêlent devant nous. Si beaucoup sont restés figés dans nos souvenirs sur les bancs des collèges et lycées, Anne Delbée s’emploie à nous les faire revivre en une magistrale explication de texte.
Devant un décor de plaques métalliques accrochées entre elles, un peu à la façon de Paco Rabanne, et sur lesquelles des images de cinéma apportent au propos sa touche actuelle et éternelle, la comédienne devient elle-même tragédienne, et laisse déferler dans son corps et sa voix les transports de la passion qu’elle voue au grand Racine.
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Quelquefois Gelsomina, quelquefois Charlie Chaplin dans son pantalon à bretelles, on ne sait plus qui de Phèdre ou d’Anne Delbée nous implore de ses répliques scandées. Mais on ne peut qu’entendre la ferveur de la déclaration d’amour d’une actrice toute dévouée à son art, et s’avançant vers nous déjà dans un autre monde, un peu comme Gloria Swanson descendant son escalier dans Boulevard du Crépuscule, le regard humide et illuminé.
Racine ou la leçon de Phèdre
conception et mise en scène Anne Delbée
Avec Anne Delbée
Scénographie Abel Orain
Réalisation vidéo Emilie Delbée
Musique Patrick Najean
Costumes Mine Barral Vergez
Illustrations Emmanuel Orain
Jusqu’au 12 novembre 2016
Théâtre de Poche-Montparnasse
5 Boulevard du Montparnasse
75006 Paris
www.theatredepoche-montparnasse.com