« STALINGRAD »  Requiem pour la vie, hymne à l’amour 

Après avoir présenté Ramona au Festival d’Avignon IN cet été, la troupe de Rezo Gabriadze s’installe pour quelques jours au Théâtre le Monfort avec un second spectacle :  Stalingrad. Lointainement inspiré de l’écrit d’un correspondant de guerre, qui décrivait le paysage surréaliste de la bataille de Stalingrad, l’oeuvre n’est pas, comme on pourrait le croire, un récit documentaire de cet épisode sanglant de la Seconde guerre mondiale, mais plutôt un requiem onirique à tous ceux, humains ou animaux, qui s’y sont éteints.

Par tableaux entrecroisés se déroulent plusieurs fragments de vie, sur fond de mitraille et de bombardements : il y a le cheval Aliocha, amoureux de Natacha, l’étoile de cirque ; il y a Gorenko, le général soviétique ; mais aussi la fourmi et sa fille, l’artiste allemand ruiné, le soldat délaissé par son amour, et tous les autres, de Staline au vendeur de citronnade. Pour beaucoup, ces fragments de vie seront aussi des récits de mort à la fois violents et sublimes, teintés d’un désespoir nostalgique et parfois même cynique, mais toujours emprunts de cette poésie et de cette finesse que l’on avait déjà pu voir dans  Ramona. Ce n’est pas là un manifeste contre la guerre, ni une tragédie larmoyante, mais un hommage à la vie et, plus que tout, un hymne à l’amour. Car ici, en effet, on n’entendra pas de mot de haine, seulement des témoignages de tendresse portés par des personnages que l’Histoire dépasse et entraîne, et dont l’ultime volonté est d’aimer jusqu’au dernier instant.

Les marionnettistes manipulent à vue, avec une précision extrême et une gravité que l’on sent profondément empathique envers les silhouettes de bric et de broc, fil de fer, bois ou chiffon, qu’ils font vivre et mourir. Une fois encore, les voix sont enregistrées par des acteurs, ce qui leur confère une résonance particulière où chaque inflexion est amplifiée par le volume des hauts-parleurs. Les dialogues sont assez économes en réalité, car la musique domine bien souvent la représentation, lui insufflant tour à tour des rythmes languissants ou ironiquement vifs comme ceux d’un vieux manège au bord du délitement. Entre fantaisie poétique et onirisme noir, la troupe de Rezo Gabriadze compose un monde séduisant jusque dans sa misère. On est ému, saisi aux tripes par ces personnages attachants par leurs imperfections, et ces images tendres et cruelles, imprégnées d’humour et, dans la tristesse, d’une immarcescible force de vie. On ne sort pas indemne des ruines enneigées de ce Stalingrad.

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LINCOLN CENTER FESTIVAL 2010

© Stéphanie Berger

 

Informations pratiques

Auteur(s)
Rezo Gabriadze

Mise en scène
Rezo Gabriadze

Avec
Tamar Amirajibi, Anna Nijaradze,Vladimer Meltcer, Badri Gvazava, Irakli Sharashidze
et les voix de
Igor Toltikov, Igor Luchinsky, Tatiana Kuznetsova, Valery Bassel, Iury Plashkov, Oleg Shkolnik, Viktor Strizhev, Nataliya Smirnova, Inessa Romanova, Oleg Fendura, Anatoly Paduka, Iury Loparev, Vasily Yakovets, Evgeny Buber, Iury Vitikov, Tatiana Minkina, Svetlana Vinogradova, Liya Akhedzhakova

Dates
Du 21 au 25 novembre 2017

Durée
1h30

Adresse
Théâtre Le Monfort
Parc Georges Brassens
106 rue Bancion
75015 Paris


Informations et dates de tournée
http://www.lemonfort.fr