Un article de Thibault David
Hamlet a un super costume
Depuis 2002, la Cordonnerie (nom de la compagnie lyonnaise) travaille son ciné-théâtre à base de contes, de bric-à-brac foutraque et d’inventions sonores. Après Blanche-Neige ou la chute du mur de Berlin, les voici s’attaquant au mythe shakespearien. Et c’est jouissif.
© Laurent Combe
Le principe de base est simple. D’abord, La Cordonnerie choisit la matière (Hamlet, ici, en l’occurrence). Ensuite, un film muet est réalisé, destiné à être diffusé sur scène, avec doublage, bruitage, et bande-son en live. Un ciné-théâtre, donc.
La scène ressemble à un vide-grenier de musiciens-brocanteurs-cinéastes-gamins-des-années-70. Une échelle de travelling au sol, des tambours, un clavecin, des pianos de toutes les tailles, des peluches-mouettes, un parapluie, un sachet de Lustucru, et caetera.
Et ça démarre. Le sachet de Lustucru versé dans le parapluie ouvert, et on entend les vagues du Danemark. Début du film, gros plan sur la plage, la percussionniste et le pianiste s’installe, cut, Horatio apparait à l’écran, photographe officiel de la cour, « Quelque chose est pourri au royaume du Danemark ». Ambiance mi-gestapo, mi-film d’espion. Et on rentre dans la grosse production, avec générique d’enfer, pianos/tambours/keytar en furie, et la chair de poule en prime. C’est un bonheur à voir.
© Sébastien Dumas
Car ces cordonniers sont des orfèvres. On ne détaillera pas toutes leurs trouvailles au plateau, préférant garder la surprise. Mais c’est de l’artisanat haut-de-gamme, réglé au millimètre, du doublage sur-mesure qui mériterait de venir voir le spectacle trois fois : une première pour la découverte, la deuxième pour se focaliser sur le film, et la troisième pour enfin observer ce qui se passe au plateau.
Cette relecture d’Hamlet permet non seulement de redécouvrir l’œuvre, mais en plus de permettre sa compréhension dès 8 ans, volonté affichée de la compagnie qui destine son ciné-théâtre à tous. (super) Hamlet se déguste comme une douceur, un bonbon qu’on voudrait faire durer le plus longtemps possible.
« Quelque chose est pourri au royaume du Danemark ». Heureusement, quelque chose est magique chez la Cordonnerie.
(super) Hamlet
d’après
William Shakespeare & Les Contes de Shakespeare de Charles & Mary Lamb
film
scénario & adaptation : Métilde Weyergans & Samuel Hercule
réalisation : Samuel Hercule
direction artistique : Métilde Weyergans
musique : Timothée Jolly
décors : Bérengère Naulot
chef opérateur : Catherine Pujol
costumes : Rémy Le Dudal
avec : Samuel Hercule, Métilde Weyergans, Timothée Jolly, Philippe Vincenot, Philippe Uchan, Michel Le Gouis
spectacle
mise en scène, bruitages, voix & jeu : Samuel Hercule & Métilde Weyergans
piano : Timothée Jolly
percussions : Florie Perroud
son : Éric Rousson & Adrian Bourget
lumières : Johannes Charvolin & Sébastien Dumas
Du 18 au 22 avril
Durée : 1h
Théâtre des Abbesses
31 rue des Abbesses – Paris 18
http://www.theatredelaville-paris.com/