« UN HOMME QUI DORT » ou qui ne sait plus comment vivre, par la Cie les Âmes Libres

Un homme qui dort de la Compagnie les Âmes Libres © DR

Dans les caves du théâtre de l’Essaïon, et ce jusqu’au 29 février (date qui ne revient que tous les quatre ans), un comédien, silencieux, et une comédienne, qui l’est un peu moins.

Ce texte de Georges Perec, peu adaptable à la scène, raconte l’histoire d’un homme qui, un matin, ne s’est pas levé pour assister à ses examens. Cet homme se retire de la société, des obligations, et mène une vie quasi végétale dans son 5 mètres carrés, où les objets les plus insignifiants tels qu’une bassine en plastique rose, les six chaussettes à tremper ou le bol de Nescafé prennent une importance démesurée. C’est l’histoire d’un homme silencieux qui « découvre sans surprise qu’il ne sait pas vivre, et ne le saura jamais. »

La scénographie est intéressante et travaillée. L’Essaïon se prête parfaitement au décor d’une chambre parisienne d’étudiant, et la lumière, sombre et bien utilisée, renforce cette impression d’étouffement et de petitesse.
Un lit de fer pliable, une table de chevet avec un réveil, une petite table, un bol de Nescafé, une valise, des chaussettes, tout dans cette scénographie révèle la pauvreté et la misère de l’âme.

Les deux comédiens fonctionnent comme un miroir, et tandis que l’une parle, dévoilant les pensées intimes de l’homme en utilisant le pronom « tu », l’homme lui, s’assoit, se lève, regarde son plafond, dans une sorte de danse vide et macabre. Le manque d’expression ou d’étincelle de vie dans son visage, nous donne la frayeur d’un jour « avoir quelque chose de cassé » comme lui, et de finir ainsi. Sort peu enviable que de se couper ainsi des hommes et du temps.

Le texte, porte toute la puissance de Perec, mais est difficilement adaptable à la scène. Sans le travail des lumières et de la scénographie, qui sont remarquables, cette pièce n’aurait pas eu un si grand intérêt. Peu d’actions au plateau, seule la comédienne récite le texte de Perec et il est facile de laisser ses pensées divaguer jusqu’à perdre le fil. On ne peut pas reprocher à la compagnie les Âmes Libres d’avoir eu envie d’adapter ce texte, beau et percutant, mais il faut espérer que les dates à venir leur donneront l’occasion de peaufiner le jeu et la mise en scène, afin d’y mettre plus d’aspérités et ainsi de captiver le public.

Ce texte mérite d’être connu, mais aussi éventuellement, d’être joué de manière plus vivante et captivante. Malgré la beauté des mots de Perec, de la scénographie, ou de l’envie des comédiens, le public pourrait avoir du mal à se laisser happer par Un homme qui dort.

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Un homme qui dort de la Compagnie les Âmes Libres © DR

Informations pratiques

UN HOMME QUI DORT – Compagnie les Âmes Libres

Auteur(s)
Georges Perec

Mise en scène
Stéphane Daurat

Avec
Richard Arselin, Véronique Boutonnet

Création lumières Mathias Bauret et Richard Arselin

Dates
Du 23 novembre 2023 au 29 février 2024, Les jeudis à 19h au Théâtre de l’Essaïon, Paris

Durée
70 mn

Adresse
Théâtre de l’Essaïon
6, rue Pierre au Lard
75004 Paris

Informations complémentaires
Théâtre de l’Essaïon
www.essaion-theatre.com