« UNE BÊTE ENTRE LES LIGNES », pas si bête

Une bête entre les lignes, mise en scène par Jade Duviquet

La Reine Blanche est un lieu culturel à part dans le paysage parisien. Le théâtre y tient une place centrale, mais on y partage beaucoup d’autres choses : littérature, cinéma, musique, arts visuels, cuisine et cette matière a priori réservée aux laboratoires et à la recherche fondamentale, la Science.
C’est ainsi que sont proposées chaque saison des conférences spectaculaires, des conférences « dérapantes » où la science est mise à l’honneur, comme avec Une bête entre les lignes. Dans une logique d’hybridation des formes expressives et de décloisonnement des disciplines, il s’agit ici pour la metteuse en scène Jade Duviquet de s’emparer de la parole scientifique portée par Anne Simon pour la rendre sensible, intelligible à tous les publics, des experts aux néophytes.

Anne Simon est directrice de recherche au CNRS. Spécialiste de Proust, auquel elle a consacré quatre ouvrages, elle a en parallèle orienté depuis deux décennies son travail sur le vivant et l’animalité en littérature, notamment au travers de son récent ouvrage « Une bête entre les lignes » publié en 2021. Anne Simon est ainsi devenu l’initiatrice en Europe de la zoopoétique. Il s’agit de l’étude des relations entre la littérature et les mondes animaux, nouveau domaine de recherche appelé l’écocritique, apparu dans les mondes anglo-saxons il y a une quarantaine d’années. L’objectif visé est d’analyser les représentations littéraires de la nature et du monde vivant, pour mieux comprendre le rapport que nous Humains entretenons avec lui.

Dans le cadre d’Une bête entre les lignes il s’agit plus spécifiquement de mieux appréhender la façon dont nous nous positionnons vis-à-vis des animaux, quelle place nous leur accordons, de rappeler en fait notre filiation et de questionner notre rapport trop souvent et depuis si longtemps dominateur et prédateur.

Pour aborder ces questions le théâtre de la Reine Blanche nous convie à un nouveau genre de conférence, ludique, joyeux et plein d’humour. Fini le temps où le conférencier restait coincé derrière son pupitre ! Anne Simon se retrouve sur scène avec Cyril Casmèze, performeur zoomorphe, Jade Duviquet, metteuse en scène et comédienne, tous deux membres de la Compagnie du Singe Debout et Michel Schick, musicien multi-instrumentiste.

Après avoir ouvert cette conférence en conviant directement les spectateurs à répondre à brûle-pourpoint à quelques questions, Jade Duviquet anime la conférence avec Anne Simon. Le dialogue qui s’instaure est régulièrement ponctué par un intermède musical bienvenu, mais aussi interrompu ou encore illustré de façon facétieuse par Cyril Casmèze dont les incarnations animales successives sont des plus réussies !

Le pari de rendre accessible la science et ici la zoopoétique est donc bel et bien tenu. Le spectateur en sort revigoré et avec un regard neuf sur ses liens avec le monde animal qui l’entoure et dont il fait partie !