« ZAÏ ZAÏ ZAÏ ZAÏ » Quand on oublie sa carte de fidélité, faut pas venir pleurer

Y-a-t-il besoin de présenter Zaï Zaï Zaï Zaï ? Ce n’est pas seulement une rengaine de notre Joe Dassin national (mais si, souvenez-vous, j’ai attendu attendu, elle n’est jamais venue), c’est aussi depuis 2015 le titre d’un album qui a mis en lumière Fabcaro, auteur particulièrement prolifique dans la branche de la BD type « humour » (dirait le principal intéressé). C’est l’histoire d’un mec qui oublie sa carte de fidélité Super U. On tente de l’arrêter. Il fuit. S’ensuit, entre autre : débats, roulades arrières, single des enfoirés, polémiques en pagaille et non-sens savoureux. Programme alléchant, donc.

Mais avec un tel bijou, pas question de se contenter du neuvième art ! La radio s’en est emparé (voir « Mégacombi », en ligne sur Arteradio), un film serait en cours, et évidemment, on retrouve aussi le sens de la formule fabcarien jusque sur nos planches de théâtre.

Particularité de cette adaptation ? Son format radiophonique. Zaï ZaÏ Zaï Zaï est une pièce qui va vite. Très vite. Une cinquantaine de personnages à incarner, ça demande de l’efficacité, messieurs dames. Et ça tombe bien, parce que ça se démène sur le plateau. Ça fuse dans tout les sens, le timing est impeccable, on reste soufflé devant la prouesse des comédiens à incarner, sans temps mort, les caissières, vigiles, flics et cas sociaux qui peuplent les cases de la BD.

On sent d’ailleurs le plaisir jouissif de la troupe à jouer ce texte (les répliques de Fabcaro sont de toute façon un bonheur en soi). Ça court entre les micros, ça se bouscule, on se jette sur les accessoires sans vergogne et un joli chaos organisé naît de tout ça, accompagné par une bande-son aux petits oignons et une guitare sur scène ; juste ce qu’il faut pour en prendre plein la face.

© François Goizé

 

Mais, à trop vouloir jouer les bons élèves, Paul Moulin (ici metteur en scène) en perd la jubilation brute qu’on peut trouver à la lecture de ZaÏ Zaï Zaï Zaï. Certes, la machine est bien rodée, les comédiens excellents, le texte original respecté à la virgule près ; mais il nous manque un peu de folie brute, de liberté prise sur la matière première, pour être totalement convaincu.

Zaï Zaï Zaï Zaï reste, à n’en pas douter, un excellent spectacle ; mais qui n’égale pas l’œuvre originale. Peut-être est-ce dû au découpage caractéristique de la bande dessinée, compliquée à retranscrire au plateau ; peut-être un manque de liberté dans l’appropriation (ou le réchauffement climatique, l’alignement des planètes, si vous avez d’autres idées, on est preneur). Il manque juste un petit on ne sait quoi pour parachever cette adaptation.

Attention, tout de même. On ne vous dit pas de ne pas aller le voir. Alors voilà un petit conseil : si vous n’avez jamais lu Fabcaro, foncez. Mais si vous êtes un adepte du bonhomme, allez-y tranquillement, vous savez déjà à quoi vous attendre. Dans tout les cas, vous allez vous faire plaisir.

Informations pratiques

Mise en scène
Paul Moulin

Adaptation
Maïa Sandoz

Avec
Aymeric Demarigny, Adèle Haenel, Emmanuel Noblet, Aurélie Verillon, Maxime Coggio, Elisa Bourreau, Christophe Danvin et Cyrille Labbé, avec la voix de Serge Biavan

Création sonore
Christophe Danvin

Dates
Du 23 janvier au 9 février 2019

 

Durée
1h

 

Adresse
Le Monfort Théâtre
106 rue Brancion, 75015 Paris

 

Informations complémentaires
http://www.lemonfort.fr/