« RANGER » de Pascal Rambert, le bilan d’une vie à Hong-Kong

Ranger, mise en scène Pascal Rambert © Louise Quignon

Des kilomètres pour ranger à distance, sa vie, dans l’espace d’une chambre blanche d’hôtel ultra moderne de Hong-Kong, voilà ce que propose Jacques, qui veut en finir, aux spectateurs. Il est 23h30. L’obscurité qui baigne l’entrée de Jacques, valise à la main pour l’ultime voyage, tranche avec le décor blanc aux lignes épurées. La lumière révèle un costume noir trois pièces sur une chemise blanche, tenue mise pour faire plaisir à la compagne défunte qui l’aimait ainsi et à laquelle Jacques s’adresse devant le portrait sorti de la valise et posé sur la table. Le manque se résume en cette phrase simple « Je ne suis rien sans toi ». La douleur de l’absence à laquelle il ne se fait pas, lui laisse croire qu’elle pourrait être encore là. Avec le costume, elle le frôle. Avec la chanson de Charles Aznavour « Hier encore », la nostalgie des 20 ans s’écoule le long des jambes allongées (proposition de l’acteur) dans l’obscurité pour mieux écouter. L’éclairage des trois fenêtres de la chambre est d’une couleur différente. Du bleu à l’orange, les couleurs d’une vie défilent dans le monologue joué avec nuance. Les teintes en sont parfois grises, parfois gaies. Les déplacements de l’acteur sont fluides et il se prête même à une danse libre et toujours nostalgique sur la chanson « Midnight Summer Dream » par les Stranglers à la fin de la pièce.

Ranger, le texte de Pascal Rambert sans autre ponctuation que le point d’interrogation dans le texte édité aux éditions « Les solitaires intempestifs » (cf critique Théâtre Actu Ranger) est très beau et respecté dans son intégralité par l’acteur qui avance en spirale sur l’annonce du début. L’auteur l’a écrit spécialement pour l’acteur. Ils se sont rencontrés au Festival d’Avignon. La voix de Jacques Weber est intérieure. Il parle à son épouse défunte, à lui et à leur couple soudé par des passions communes bonnes et mauvaises pendant cinquante cinq ans ainsi qu’à nous, spectateurs attentifs. En dehors de la grande chambre vêtue de blanc, au lit king size, les objets comme le minibar et la valise justifient les allers et retours du protagoniste. Mais la plus grande émotion de la pièce surgit au moment où le grand acteur dans tous les sens du terme, parle à l’ours de sa femme, confident réchauffe-cœur de l’enfant qu’elle fut et en tire une lettre d’amour qu’il embrasse après nous l’avoir lue.

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Ranger, mise en scène Pascal Rambert © Louise Quignon

Informations pratiques

RANGER

Texte et Mise en scène
Pascal Rambert

Interprétation
Jacques Weber

Collaboration artistique Pauline Roussille
Créateur lumières Yves Godin
Costumes Anaïs Romand
Espace Pascal Rambert et Aliénor Durand
Répétiteur José-Antonio Pereira

Dates
Du jeudi 2 au samedi 18 février 2023 au Théâtre des Bouffes du Nord, Paris

Durée
1h25

Adresse
Théâtre des Bouffes du Nord
37 bis, boulevard de La Chapelle
75010 Paris

Informations complémentaires

Théâtre des Bouffes du Nord
www.bouffesdunord.com